Chapitre 5
C’est en pénétrant dans ma chambre après avoir pris une douche que je vois toutes mes affaires dans ses sachets un peu partout sur le sol. Je n’ai pas besoin de demander ce qui se passe pour savoir que Malik a tout raconté à sa famille. Ce qui veut dire qu’il était vraiment sérieux cette fois-ci. Puisque ce n’est pas la première qu’il a proféré ce genre de menaces, mais cette fois je vois bien qu’il ne parlait pas au hasard.
FLASH BACK ////
Comme un rituel, je suis assise dans le salon en face de mes beaux-parents ainsi que de mon mari.
Moi : excusez moi de vous avoir convoqué à cette heure ci mais Malik à quelque chose à vous dire.
Lui : ???
Moi (à lui) : Malik
Lui : oui ?
Moi : tu peux répéter devant tes parents ce que tu m’as dit la nuit dernière ?
Malik (levant les yeux) : j’avais dit quoi ?
Moi : n’est-ce pas que tu m’as dis que tu me répud…
Belle-maman (m’interrompant) : ehh c’est quoi ça dès le matin, (regardant son fils) tu as quelque chose à nous dire ?
Malik (haussant les épaules) : pas que je sache
Moi :
Beau-père : qu’est-ce qu’il y’a Rabya ?
Moi (dépassé) : mais toi Malik…
Celui-ci (m’interrompant) : je n’ai rien à dire.
Belle-maman (se levant) : eh on vous laisse gérer vos problèmes et la prochaine fois avant de nous appeler pour des choses pas claires réfléchissez bien.
Moi (perdue) : non impossible
Malik : qu’est-ce qui est impossible ?
Moi : tu m’as répudiée hier nuit.
Lui : sous le coup de la colère et y’avait pas de témoins alors ça ne compte pas.
Moi : tu te fous de moi ?
Lui (se levant) : je vais au boulot.
Moi :
Lui : si tu veux divorcer tu n’as qu’à me le demander.
Moi : hii
Belle-maman : oui mon fils en plus si c’est elle qui demande le divorce aucun matériel ne sortira d’ici.
Moi : …
Comment peut on être aussi manipulateurs ?
FIN DU FLASH BACK
Astou : vas-y ramasses tes affaires au plus vite.
Elle me balance cette phrase dès que nos regards se rencontrent.
Belle-maman (levant les mains en l’air ): enfin Dieu a entendu mes prières.
Astou : gloire à Lui.
Belle-maman (le petit sourire narquois) : Celle qui aimait faire la grande bouche, aujourd’hui on verra où ça va te mener.
Astou : maman laisse, elle se croyait invincible.
Pour ne pas les entendre plus longtemps, je sors de la chambre avec mon téléphone afin de répondre à l’appel téléphonique de ma mère.
Moi : allô maman
Elle : oui Rabya comment tu vas ? Ta belle-famille vient de nous convoquer.
Moi (la gorge nouée) : je ne vais pas bien maman.
Elle : il se passe quoi ?
Moi : tu peux venir s’il te plaît ?
Elle : eh il est arrivé quelque chose de grave ? Nous sommes en route ton père et moi.
Moi : juste viens s’il te plaît.
Elle : ok j’arrive
Au lieu de rentrer de nouveau dans la chambre qui était jusqu’à hier la mienne, je me dirige vers celle des enfants pour les réveiller afin qu’elles prennent leur douche.
Moi (la secouant un peu) : Yacine, Yacine réveilles toi.
Yacine (levant la main) : attends encore un peu maman.
Moi : non vas-y levez vous vous devez prendre votre bain. Nous allons chez grand-mère.
Elle (se relevant) : ok je vais prendre une douche.
Moi : fais vite, je vais réveiller les jumelles après pour leur donner leur bain avant le réveil du bébé.
Yacine : ok maman
C’est en traînant les pieds que je me dirige vers leurs tiroirs, chercher leurs habits que je range. Au fur et à mesure des minutes qui passent je repense à ma vie.
Pourquoi moi ? Pourquoi cette vie ?
Je ne sais pas ce que je ressens en ce moment, mais j’ai le cœur qui tambourine tellement fort que je pense à y presser ma main pour le calmer. J’ai du mal à jouer ce film sans réagir, étais-je une mauvaise femme, une épouse reprochable ? J’ai du mal à refouler ces larmes qui menacent de jaillir à tout moment.
****
Mes parents arrivent juste au moment où je finis de donner le sein à bébé Khadija.
Mes parents : asalamou aleykoum
Moi : waleykoum salam
Je n’ai même pas pris le temps de changer mes habits d’hier. Mon père, lui ne reste pas avec nous et se dirige vers là où se trouve les hommes.
Maman (s’approchant) : qu’est-ce qu’il se passe ma fille ?
Belle-maman choisit ce moment pour sortir de ma chambre avec mes affaires accompagnée de sa fille. Elles n’hésitent pas à tout balancer vers nous.
Belle-maman : enfin vous êtes là
Ma mère (se relevant) : bonjour
Belle-maman : inutile de s’éterniser avec les formalités. (balançant le reste de mes affaires) voilà les affaires de votre fille. Prenez les
Maman : comment ça les affaires de ma fille ?
Belle-maman : ah elle ne vous a pas dit qu’ils ont divorcé ?
Ma mère (écarquillant les yeux) : quoi ?
Belle-maman : oui depuis hier nuit votre fille n’est plus la femme de mon fils.
Ma mère (se tournant vers moi) : est-ce vrai ?
Je hoche simplement la tête
Ma mère : mon mari est en bas entrain de discuter avec votre fils et son père.
Belle-maman : inutile de perdre du temps, ce mariage est belle et bien terminé.
Ma mère : et c’est toi qui te permet de congédier ma fille ?
Belle-maman : vous voulez quoi d’autre, il n’y a plus de mariage reprenez votre fille ou vous voulez nous la forcer ?
Ma mère (secouant la tête) : hum on dirait même que tu n’es pas une mère, tu penses que je ne sais pas tout ce que tu lui as fait subir jusqu’ici ?
Belle-maman (levant les yeux) : c’est son passe temps favori de jouer les victimes mais je vois que c’est le point fort de votre famille.
Ma mère (à moi) : tu as pris tes affaires ?
Moi (reprenant mes esprits) : non attends je vais vérifier.
Astou (me barrant la porte) : pas besoin, tout ce que tu avais apporté lors de ta venue sont emballés dans ces sachets.
Moi : eh pousses toi.
Belle-maman : Astou laisse la passer en tout cas aucun matériel acheté par mon fils ne sortira d’ici.
J’entre dans la chambre l’air nostalgique, pas parce que je regrette, mais parce que j’ai de nombreux souvenir liés à cette chambre. Aujourd’hui voilà que je suis appelée à la quitter.
Je touche un peu tout pour me rappeler de chaque détail, une fois le souffle repris je cherche s’il n’y a pas une chose qui m’appartient encore à l’intérieur.
Heureusement que j’y suis retournée, mes perruques, mes bijoux étaient cachés dans l’une des armoires avec certains habits. Je prend et ressors de la dite chambre.
Dès que je me retourne, je vois qu’elles sont là bien présentes à me surveiller.
Astou : eh ceux là ont été achetés par mon frère.
Moi (la fixant) :
Belle-maman : laisses ma fille, ce n’est rien. L’essentiel c’est qu’elle quitte enfin cette maison.
Ma mère (nous retrouvant) : ne laisses rien qui t’appartienne ici, absolument rien.
Belle-maman (souriante) : hii comme si elle avait beaucoup d’affaires.
Ni moi, ni maman ne soulevons la réplique.
Toutes les affaires emboîtées, ma mère m’aide à les faire descendre.
Beau-père (à son fils) : tu es sûr de ta décision ?
Malik : oui c’est fini entre elle et moi.
Mon père : ok, c’est bon en tout cas saches que c’est dans une maison que tu l’avais trouvé et c’est aussi dans une maison qu'elle retournera.
Belle-maman : bon débarras
Beau-père : adja
Ma mère (à mon père) : allons-y j’ai appelé le camion de déménagement , ils seront bientôt là.
Pendant ce temps, je descendais l’escalier avec mes enfants.
Ousseynatou (contente) : on va habiter chez grand-mère maintenant.
Assanatou : oui youpiii
Arrivées près d’eux voilà Malik qui se retourne sans me jeter un regard.
Moi : les enfants du calme.
Yacine était la seule qui semblait comprendre ce qui est entrain de se passer. Elle a le regard vide et n’a pipé depuis qu’elle a vu nos affaires à l’étage.
Malik : et les enfants ?
Belle-maman : comment ça ?
Malik (tirant la main des jumelles) : mes enfants ne partiront pas d’ici.
Beau-père : tu t’entends parler ?
Belle-maman : eh Malik calmes toi, ces enfants ne peuvent pas rester ici, qui s’en occupera même ? Laisses les partir avec leur mère après si tu veux tu peux toujours les rendre visite puisque tu es leur père.
Ma mère : hum
Astou : c’est vrai mon frère laisses les partir en plus ce ne sont que des filles, si vous aviez un garçon j'aurais compris.
J’ai le cœur fendu en regardant cette famille qui n’a jamais hésité à me rabaisser, des coups que j’ai appris à encaisser au fil des années.
Est-ce le moment de fissurer cette carapace de femme faible ? N’est-ce pas de ma faute s'ils se sont autant permis de tels mépris.
N’est-ce pas moi qui leur ai tendu le bâton avec lequel ils n’ont pas hésité à me taper sous prétexte du fameux ‘’mougne’’ (supporte).
Le seul qui a honte de rencontrer mon regard, c’est mon beau-père il semble tellement dépassé par ces événements. Sans hésiter, ma mère me fait sortir de la maison, je jette un dernier regard derrière moi pour graver ce jour dans ma tête.
****
Dès que nous voyons la camion qui arrive, ma mère se précipite pour leur faire signe de la main afin de leur situer la maison.
Les déménageurs : où sont les affaires.
Ma mère : venez je vais vous montrer.
Voilà les gens du quartier qui commencent à sortir sûrement pour s’enquérir de ce qu’il se passe avec tout le carcas et le bruit du camion.
Ma mère : ne t’en fais pas je suis là.
Moi (la gorge nouée) : heureusement maman.
Ma mère retourne dans la maison sans moi pour leur montrer mes affaires.
Le visage de certains voisins montrent la surprise, d’autres de la tristesse et le reste du dédain. Après que les déménageurs aient fini de tout transporter, mon père arrête un taxi.
En route de nouveau chez mes parents, je me demande si ce que je suis entrain de vivre est réel.
Non, je dois sûrement être entrain de rêver. C’est impossible que ça soit entrain de se passer.
J’ai connu bien des tourments dans ce socle que j’appelais mariage. Je me rappelle alors encore de cette soirée où il est rentré bredouille en sentant le parfum d’une autre ou bien de l’autre soir ou il a prétendu rejoindre des amis qui ont téléphoné pour demander de ses nouvelles.
Je me suis alors sentie souillée, blessée. À qui pouvais-je en parler sans être jugée ? Qui pouvait se mettre à la place de cette femme métamorphosée pour camoufler ses blessures de guerre?
Aujourd’hui je me rappelle de cette jeune fille pleine de vie, joyeuse qui croquais la vie en pleine dent. Cette fille qui planifiait pleinement son futur. Hélas elle est partie, cette fille a sombré dans le vide laissant derrière elle, une femme blessé, meurtrie et détruite.
Bien-sûr cette fille c'est bien moi.
Suis-je capable de me relever ?
Est-il encore possible de tout recommencer ?
Je ressens de l’amertume dans le cœur, une coquille vide à force d’être cassée.
Combien de fois me suis-je bercer d’illusions ?
Moi qui pourtant aspirait à une vie de famille heureuse, ma peine a été grande de voir que tout n’était que mirage. La main qui me sèche une larme, me ramène vers cette réalité sombre qui est entrain de me tourmenté.
Ma mère : eh ça va aller.
Lit-elle la détresse, l’amertume qui fend mon âme ?
Peut-elle voir jusqu’où ma douleur commence ?
Étirer mes lèvres me demande une force pour bien rassurer celle qui je sais ne me trahira jamais, cette femme qui aujourd’hui suis sûre aurait préféré avoir un pouvoir surnaturel qui lui aurait permis d’effacer ma douleur, ma peine...
Souvent dans ma chambre, je me suis plusieurs fois posé la question de pourquoi j’étais encore dans ce mariage.
Est-ce la peur de finir seule ? Ou celui du slogan bien connu ?
Les enfants, c’était mon mensonge perpétuel pour me convaincre que c’était la meilleure des décisions. Où suis-je alors aujourd’hui, en ce moment ?
Est-ce que lui il a pensé à ses enfants ?
Je me suis souvent demandée après chaque déception si ce serait la dernière. Je gardais espoir au fond de moi qu’un jour ils verraient d’une autre façon, que Malik viendrait sécher mes larmes à jamais.
Là vie est boomerang c’est aujourd'hui que je comprend le sens de cette phrase.
Une personne non touchée par quelque chose de la vie ne peut comprendre ce que la personne touchée doit ressentir. C'est en étant la concernée qu'on comprend réellement la douleur insupportable.
Je vais essayer de penser à autre chose, demain est un autre jour personne ne sait de quoi est fait demain . Dieu me réserve quelque chose de meilleur peut être.
Bonne lecture mes cocos bisou de moi