Chapitre II

1753 Words
Chapitre II Déjà huit jours s'étaient écoulés après la découverte du cadavre de Thomas Ederson. Plus les jours passaient plus Kate était persuadée que le tueur ne frapperait plus et qu'il fallait se rendre à l'évidence que Jerry avait raison. Le tueur avait saisi au hasard pour créer le crime parfait ou alors il s'agissait réellement d'une vengeance d'une des victimes des affaires où Ederson avait défendu l'accusé. Si tel était le cas, cela ne devrait pas être difficile de retrouver la trace, bien que les huit jours qui venaient de s'écouler n'aient rien donné. Toute la vie de Thomas avait été passée au peigne fin et rien d'anormal ou rien qui ne laissait présager une éventuelle agression n'avait été décelé. Celui qui avait fait ça l'avait prémédité d'une manière si intelligente et méticuleuse que les techniciens scientifiques n'avaient pas trouvé le moindre indice. C'est ce qui d'un côté fascinait Kate, personne ne croyait au crime parfait, mais là, elle le constatait elle-même, aucun cheveu, aucun ongle, aucune empreinte n'avait été retrouvé. Elle se frotta les tempes et secoua la tête. Impossible. Il y avait une faille quelque part. Il y avait toujours une faille. Et le laboratoire de New York était le mieux équipé pour déceler la moindre cellule de peau sur un tapis ou au fin fond d'un siphon de baignoire. ― Jerry ? ― Oui ? répondit-il distraitement en regardant un mail avec des filles dénudées qu'un collègue lui avait envoyé. Ce qui ne manqua pas de lasser Kate qui coupa l'écran d'ordinateur. ― Hey ! ― Tu n'es qu'un sale pervers Hawkins ! Allez debout, on a du pain sur la planche, Hornak a demandé à ce qu'on ait une piste d'ici la fin de la semaine. Alors lève-toi, on va sortir. ― Et où on va ? demanda-t-il en regardant sa collègue qui était déjà dans l'ascenseur. ― Sur les lieux du crime, répondit-elle alors que les portes se refermaient sur elle. Dans la voiture, Jerry était silencieux, il était très mécontent de la remarque que lui avait faite sa collègue. Question susceptibilité pourtant ce n'était pas son genre. Mais il y avait des mots qui blessaient plus que d'autres. ― Je t'interdis de dire que je suis un pervers. La réflexion surprit Kate qui jeta un bref coup d'œil à son passager. ― Pardon ? Il écarta les bras et les laissa retomber. ― Tu n'as pas le droit de dire que je suis un pervers. La jeune femme se reprit. ― Ah tu es encore là-dessus. Écoute, je suis désolée, ça te va ? Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire et tu le sais très bien. Oublie ça c'est bon. ― Tu l'as dit Kate, et je ne veux plus jamais te l'entendre dire. Oui j'aime les belles filles, je suis un mec, j'ai des désirs, c'est humain bordel, il souffla. D'ailleurs c'est tout ce qu'il me reste. La fin du trajet s'était faite dans un silence d'église, elle gara la voiture en bas de l'immeuble. Elle aurait aimé répondre à son collègue mais elle ne trouva pas les mots. Elle posa une main sur la poignée d'ouverture mais s'arrêta. ― Forcément il m'arrive d'oublier Jerry, je ne peux pas me balader constamment avec un post-it sur le front. Ne voulant pas donner suite à la conversation, Jerry quitta la voiture et l'attendit à l'entrée de l'immeuble. Il boudait comme un gamin. Ils montèrent les marches et croisèrent la belle blonde mariée ou non, au septuagénaire qui allait chercher son courrier dans une tenue plutôt très... très légère. ― Bonjour, dit-elle en regardant Jerry avec un large sourire. L'enquête avance ? Kate leva les yeux au ciel et tira par la manche son collègue. ― Désolée mais on a beaucoup à faire. La blonde haussa les épaules mais se retourna pour regarder Jerry qui la regardait également sans pouvoir décrocher un mot. Elle lui fit un clin d'œil et se détourna en se mordillant la lèvre d'un air espiègle. Jerry n'en revenait pas, cette fille lui faisait du gringue. Pour sûr qu'il en prenait note. Dans l'appartement qui sentait désormais le renfermé mêlé à la mort, Kate cherchait désespérément cette chose à côté de laquelle ils seraient passés, l'indice qui pourrait faire tout basculer. Ensemble ils retracèrent la scène de crime du début à la fin. Mais rien, ils revenaient toujours au point de départ. Au bout d'une heure trente, Jerry s'assit contre un des murs du salon, pile en face de la fenêtre. Kate vint le rejoindre, elle posa une main au sol et prit place à côté de lui. ― Il n'y a pas eu de traces d'effraction quelles qu'elles soient sur la porte, le gardien n'a vu entrer personne, nous avons regardé les caméras de surveillance qui n'ont absolument rien donné et nous nous trouvons au troisième étage. Comment est-il entré ? Jerry se rappela. ― Il lui a volé sa tour d'ordinateur, c'est donc qu'il y avait des choses confidentielles, des choses compromettantes pour Thomas. ― Oui jusqu'ici c'est ce qu'on se dit. Mais quel but de les cacher ? De nous les cacher ? Jerry haussa les épaules, au final il ne savait même pas lui-même où il en voulait en venir. Elle se leva. ― On tourne en rond là ! Oh et puis cette odeur c'est insoutenable, elle ouvrit la fenêtre et vit le laveur de carreau sur son échafaudage suspendu quelques mètres en dessous d'elle, en train d'astiquer les vitres d'un geste vigoureux. ― Hey vous là-bas ! Le laveur de vitres leva la tête et vit qu'elle présentait sa plaque professionnelle. ― Où est placé ce truc sur lequel vous êtes perché quand vous ne travaillez pas ? ― Ben sur le toit ! cria-t-il à nouveau. ― N'importe qui peut y avoir accès ? L'homme dégoulinant de sueur retira sa casquette et s'essuya le front avec. ― Bien sûr il n'y a pas de clés pour la porte du toit ! Et entre nous c'est un quartier calme, on n'a encore jamais eu de soucis et puis qui voudrait voler ce genre de truc ? Elle se tourna vers son collègue qui s'était rapproché et lui fit remarquer que personne n'était monté sur le toit. Elle invita son collègue à la suivre. Ils ouvrirent la porte en fer du toit, la chaleur qu'émanait le ciment était à la limite du supportable. Dans leurs costards-cravates, les deux enquêteurs se mettaient à transpirer. Ils s'approchèrent du bord. Kate s'accrochant d'une main à la rambarde et d'une autre à la manche de Jerry. ― Bon sang que je n'aime pas la hauteur. Ils se dirigèrent là où était le socle qui supportait l'échafaudage suspendu. ― Je crois que ceci a servi à notre tueur pour descendre. Jerry haussa les épaules. ― Aucune fenêtre n'a été cassée. ― Souviens-toi, il faisait chaud le jour de sa mort, remarqua Kate. Ederson avait sans doute laissé une fenêtre ouverte. ― Rien n'est impossible, conclut Jerry. Mais où veux-tu en venir ? ― Et bien d'une, que le tueur ne connaissait pas forcément sa victime, de deux qu'il n'a pas frappé au hasard, sinon il lui aurait suffi de toquer, elle se tourna vers lui, et de trois que nous pouvons appeler la scientifique pour procéder à d'éventuels prélèvements. ― Je trouve que tu conclues un peu trop rapidement tes thèses, Kate. Nous ne devons jamais suivre une enquête sur des suppositions. La sonnerie du téléphone de Jerry retentit. ― Hawkins, j'écoute. Oui. Où ça ? Très bien, on arrive. ― Que se passe-t-il ? ― Un cadavre vient d'être découvert à Beekman Street. Tu ne vas pas être déçue de la victime. Ils arrivèrent quelques minutes après sur les lieux du crime. L'homme avait été découvert par sa femme alors que le tueur était en train de lui trancher la gorge. Cette dernière s'était évanouie et au réveil elle s'était retrouvée à l'hôpital, car se trouvant dans un état de choc elle avait dû être transportée par une ambulance. Le corps gisait dans le salon de l'appartement du couple. D'après les premières constatations, son agresseur avait dû toquer à la porte. Quand la victime comprit que ce n'était pas une visite de courtoisie, il avait couru jusqu'à la cuisine pour trouver une arme, comme un couteau. Mais il avait été rattrapé par son tueur, qui lui serra la gorge avec du fil à pêche qu'il prit soin de ne pas trop serrer pour éviter de lui trancher la jugulaire ou la carotide afin qu'il ne meure pas dans les minutes qui suivirent l'agression. Avec les traces de sang au sol, on pouvait suivre le parcours lugubre de la victime qui avait dû se débattre de toutes ses forces. Le tueur l'avait tiré par le fil qu'il avait autour du cou jusqu'au milieu du salon où il lui avait fait retirer tous ses vêtements, puis il avait saisi la bouteille de scotch sur la petite table qu'il avait cassée pour lui lacérer le corps et lui couper les parties génitales. Quand il eut fini de s'acharner, il lui avait tranché la gorge lentement jusqu'à se faire surprendre par la femme de Richard, Anita Gaylord, qui rentrait du supermarché. Les deux agents ne pénétrèrent pas entièrement dans l'appartement afin de préserver toutes traces et indices, mais ils comprirent en regardant le corps à quelques mètres, numéroté d'un " 2 X " ensanglanté sur le ventre et l'émasculation, qu'ils avaient affaire à leur tueur. Après avoir échangé quelques banalités sur le corps et l'agression avec d'autres policiers en tenue, Kate rejoignit discrètement dans le couloir qui menait à l'appartement, Jimmy. Son pseudo petit ami de l'autre soir. Elle lui demanda de passer sur le toit de l'immeuble d'Ederson pour prélever des indices. Le jeune homme acquiesça. A la fin de leur entrevue, il avait espéré un b****r de la part de sa belle, mais sans aucun signe d'intimité, elle sortit de l'immeuble pour rejoindre Jerry. Elle n'était pas du genre à s'afficher et moins ils se montraient ensemble, mieux ils préservaient leur secret. ― Je n'y crois pas. Richard Gaylord !? s'exclama-t-elle. ― Oui, et ce n'est pas moi qui plaindrai cet enfoiré. ― Je suis d'accord, mais ça nous ramène au même point. Peter Hawk a toutes les raisons du monde de vouloir tuer Gaylord et Ederson. Malgré la conviction des deux enquêteurs à croire que Peter Hawk était innocent, tout accusait le père de la jeune Amanda de vouloir supprimer le violeur et son avocat. Alors qu'ils débattaient de leur théorie sur le mobile du tueur, Jerry se tut et laissa régner un silence, comme un suspense avant d'ajouter sur un ton tout penaud : ― En tout cas, d'après les ambulanciers, la mère Gaylord a affirmé avoir vu le tueur. Kate tourna la tête. ― Ah bon et tu ne me le dis que maintenant ? Il faut tout de suite qu'on y aille ! Il leva les deux mains, paumes vers elle. ― Ne t'affole pas poils de carotte ! Ils ont aussi ajouté qu'elle était en état de choc avancé, il se pourrait que ça nuise à sa mémoire ou justement que ça troublerait la réalité des faits, quelque chose dans le genre. ― On s'en fiche de ce que les ambulanciers option sans diplôme ont bien pu dire. On ne peut pas perdre de temps. Il faut qu'on y aille. ― Bien comme tu voudras, tu ne viendras pas dire que je ne t'avais pas prévenue si elle perd la boule et qu'elle nous dit que Gripsou est le tueur. Elle lui fit signe de se taire et de se dépêcher au plus vite. Il était temps de boucler cette affaire et Anita Gaylord avait certainement la réponse à toutes leurs interrogations. Mais alors qu'ils prenaient le chemin de l'hôpital, ils ignoraient encore qu'ils n'étaient pas au bout de leur surprise.
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