chapitre 2

851 Words
Le lendemain matin Je me réveille en sursaut, le souffle court. Le silence me pèse autant que le poids de la nuit. La pièce est baignée d’une lumière grise, filtrée à travers les lourds rideaux. Pas de ciel, pas de repères. Juste ce froid sourd qui me colle à la peau. Chaque muscle me lance. Je tente de bouger. Mes poignets sont engourdis par les liens, mes jambes tremblent. La soie de ma robe colle encore à mes cuisses. Le souvenir de ses mains, de son emprise, me brûle de l’intérieur. Je ferme les yeux. Le cauchemar est réel. Je suis toujours là. Une caméra clignote dans un coin de la pièce, petite lumière rouge. Il me regarde sûrement. Toujours. J’inspire profondément. Ne pas pleurer. Ne pas craquer. Pas encore. J’essaie de rassembler mes forces. D’analyser. D’observer. La porte est solide. Blindée. Je l’ai vu hier. Pas de serrure accessible. Les fenêtres sont scellées. Aucun objet tranchant, aucune arme improvisée. Ce n’est pas une maison, c’est une prison. Un cliquetis métallique me tire de mes pensées. La porte s’ouvre. Une femme entre. Je me fige. Brune, élégante, une quarantaine d’années, l’air professionnel. Elle porte un tailleur noir et tient un plateau d’argent. Café. Pain. Quelques fruits. Pas un mot. Elle dépose le plateau sur la table, me jette un regard neutre, presque las, puis s’approche de mes liens. Elle sort une clé discrète de sa veste, libère mes poignets, puis mes chevilles. Mes muscles protestent quand je tente de me redresser. Je vacille. Elle me rattrape sans douceur. — Lève-toi, dit-elle d’un ton sec. Je me relève, vacillante, le vertige me prenant. La femme me soutient brièvement, puis m’entraîne vers la salle de bains attenante. Tout est marbre et chrome. Froid. Aseptisé. Une baignoire immense. Des flacons de parfum coûteux. — Tu te laves. Il n’aime pas la négligence. Je la fixe, révoltée. — Dis-lui d’aller se faire foutre. Elle me regarde un instant, sans émotion. — Lave-toi, répète-t-elle. Ça vaut mieux pour toi. Elle referme la porte derrière moi. Je reste un moment figée, tremblante, puis me déshabille. Mes poignets portent des marques rouges. Mes cuisses sont meurtries. Je détourne les yeux du miroir. Je refuse de me voir ainsi. Pas comme ça. L’eau chaude me brûle presque. J’essaie de frotter, de laver son odeur, sa trace, mais rien n’efface ce qu’il a fait. Rien n’efface ce que je ressens : la haine, la peur, l’humiliation. Mais aussi une colère sourde, tenace. Je ne resterai pas ici. Il ne me brisera pas. Je sors, m’enroule dans une serviette. La femme est là, qui m’attend. Elle me tend une robe en soie noire, simple, sans fermeture, impossible à déchirer. Aucune arme cachée. — Habille-toi. Je ne bouge pas. Elle soupire, s’approche, me saisit brutalement par le bras. — Tu crois que tu as le choix ? Fais ce qu’on te dit. Je ravale ma rage, m’habille. Elle me conduit de nouveau dans la chambre. Le plateau de nourriture est toujours là. Mon estomac noué refuse d’y toucher. La porte s’ouvre de nouveau. Derek. Toujours aussi impeccable. Costard sombre, cheveux tirés en arrière, l’aura glacée d’un homme qui contrôle tout. Son regard se pose sur moi, lentement, de haut en bas. — Voilà qui est mieux, murmure-t-il. Je me redresse, le toise. — Je ne suis pas ton jouet. Et je ne resterai pas ici. Il sourit doucement, amusé. — Ah… L’espoir. C’est si joli chez toi. Mais il faudra t’en défaire. Il s’approche, effleure mon visage du bout des doigts. Je me retiens de le gifler. Il attrape mon menton, m’oblige à croiser ses yeux d’acier. — Chaque jour, chaque nuit, je te rappellerai qui tu es. Qui je suis. Et pourquoi tu es ici. Je serre les dents. — Pourquoi ? Parce que tu es un malade ? Un monstre ? Son sourire se fait plus sombre. — Non, Juliette. Parce qu'ik fau bien que quelqu'un paye Et je ne supporte pas de te voir m’échapper. Un frisson glacé me parcourt. Il relâche mon menton, se tourne vers la femme. — Elle mange. Ensuite, je la veux dans mon bureau. Compris ? Elle hoche la tête. Derek s’éloigne. À la porte, il se retourne. — Et Juliette… N’oublie pas. Chaque tentative de fuite a un prix. Es-tu prête à le payer ? Je le fixe, muette, la gorge nouée. La porte se referme. Le clic métallique me glace. Je me laisse retomber sur le lit. Mes mains tremblent. Il faut réfléchir. Trouver une faille. Il y en a toujours une. La femme s’approche du plateau. — Mange. Il déteste qu’on lui désobéisse. Je secoue la tête. — Tu es qui, toi ? Pourquoi tu fais ça ? Elle me regarde enfin, un éclair de tristesse dans les yeux. — Je suis comme toi. Ou je l’ai été. Elle dépose le plateau près de moi. — Mange. Et tiens bon. Puis elle sort. Je fixe la porte. Elle est partie. Une larme roule sur ma joue. J’essuie rageusement. Je ne suis pas brisée. Pas encore. Pas pour lui. Je le jure.
Free reading for new users
Scan code to download app
Facebookexpand_more
  • author-avatar
    Writer
  • chap_listContents
  • likeADD