CHAPITRE 1.
Asrar-Tamar Ben Ophir, voici le nom de celle qui gouvernait le royaume depuis plusieurs années...
Debout devant l’océan de sable qui recouvrait toute surface, elle sentît une douce brise caresser sa peau et laissa ainsi retomber ses paupières, les yeux déjà plongés dans le noir le plus total. Le désert était son milieu, son élément. Elle ne l'avait jamais quitté et même s'il lui arrivait de s’imaginer hors de ses terres, elle se sentait en communion avec la mer de sable.
Pendant un instant , son esprit chassa toute once de malheur qui pouvait l’habiter. Elle se mît à sourire toute seule puis enfonça ses pieds dans le sable et leva ses bras tandis que le soleil ardent commençait à piquer sa chair.
Mais la douleur, elle s'y était habituée et ça depuis belle lurette.
Son sourire retomba immédiatement et elle décolla ses paupières aux yeux condamnés pour se retourner, sentant que quelqu'un s'approchait. En perdant la vue, ses autres sens s'étaient développés au cours des années, et elle sût de qui il s’agissait exactement.
Raya- shaykhati ~Ma Cheikha~, L’habilleuse vient d'arriver. L'Annonça son bras droit et dame de compagnie.
Elle assurait ces rôles, chacun selon l'humeur de sa souveraine.
Asrar détestait ces moments, elle détestait être dérangée pendant qu'elle ne faisait qu'un avec le désert et c'est bien pour ça que Raya l'avait appelé par son titre pour prévenir ses foudres. La Cheikha se retourna le regard fermé puis commença à s'avancer. Elle savait exactement où elle se trouvait et arrivait à s’orienter facilement. Au début ce n'était pas évident mais après douze ans plongée dans l'obscurité, elle avait fini par sympathiser avec le noir.
Elle monte les marches et pénètre dans la chambre. Son aura puissant et Intimidant malgré sa fine corpulence Fît que l’habilleuse et ses deux acolytes se remirent droites alors qu'elle ne pouvait pas les voir... mais par contre elle arrivait à sentir leur peur et rien que par leur respiration, elle pouvait deviner l’endroit exact où elles se trouvaient alors valait mieux ne pas la prendre pour une pauvre infirme car elle était bien plus que ça. Sa cécité ne l'avait pas empêché de se battre et défendre son héritage, sa cécité n'avait pas dominé ses émotions, sa cécité ne l'avait pas empêché de gouverner avec classe et impartialité alors sa cécité ne l'empêcherait sûrement pas de sortir son sabre et trancher ses trois gorges si elles osaient se montrer irrespectueuses.
Cheikha barbare et insensible ? Tyranne ? Aigrie? Peu importe comment on la voyait, elle avait vécu l'impensable et avait dû douloureusement vivre avec les conséquences, alors rien ne pouvait l'atteindre... elle avait le droit de se permettre quelques caprices.
Raya- On commence avec une robe traditionnelle, bleu corail, motifs d’or sur les côtés et...
À l’annonce de la couleur, elle fronça les sourcils.
Asrar- Suivant! Lança t'elle pas du tout convaincue alors que d’ordinaire la voix chantante de Raya enjolivait les choses.
Raya lui détaillait toujours chaque tenue car la Cheikha pouvait aussi faire sa difficile et il était impossible de la satisfaire. Elle cita plusieurs tenues avant que Asrar ne se lève un peu agacée.
Asrar - Rappelle-moi pourquoi toutes ces robes déjà ?
Raya - Nous célébrons Majesté en mémoire de vos défunts proches les dix ans de votre règne et de plus...
Asrar - Non! L'arrêta t-elle en penchant sa tête sur le côté comme elle en avait l'habitude.
Son regard d'une Parfaite trajectoire, fixé sur celui de Raya lui donnant presque l'impression qu'elle pouvait la voir.
Asrar - Pourquoi une robe !
Elle se retourna inconsciemment dans une projection parfaite, ses yeux fixèrent l’habilleuse qui déglutît presque immédiatement. Celle-là même qui l’habillait depuis des années, toujours avec la même difficulté.
Raya- Majesté, c'est une cérémonie unique et aussi...
Asrar - Faites venir Hamed! La coupa t'elle l'expression de nouveau fermée.
Raya- Hamed est au conseil Ma Cheikha. Dit-elle dépitée.
Elle se retourna immédiatement vers elle sourcils froncés sans cette fois-ci pouvoir dominer les yeux de Raya.
Asrar - Une réunion ? Si je n'y suis pas c'est que ça ne doit pas être très important, alors Fais-le venir immédiatement ! Grinça t'elle puis retourna s'asseoir impérialement sur le lit.
Raya regarda la pauvre habilleuse d'un air désolé puis S'exécuta.
Le petit moment où elle resta silencieuse, les trois êtres présents avec elle dans la pièce respiraient difficilement, la peur au ventre. Si la beauté de leur souveraine était convoitée, elle était toute aussi crainte!
Qui sait de quoi était capable une telle souveraine !
Peu de temps après, la porte s'ouvrît sur Hamed et Raya.
Hamed- Sa Majesté a-t-elle souhaité ma présence ?
En entendant cette voix rassurante, son visage se décrispa mais elle ne se leva pas.
Après l'horrible tragédie dont sa famille avait été frappée, elle n’avait pu s’appuyer que sur Hamed. Il a avait été son plus grand et solide bouclier pendant une période, une très longue période sombre de son existence. Il l’avait convaincu que sa cécité n’était pas un obstacle mais une force, elle avait la capacité de faire plier tout le monde si elle se montrait assez ferme et confiante devant une cité consumée par des multiples tragédies.
Elle avait réussi à redresser son royaume et préserver l’héritage royale les yeux plongés dans un noir angoissant.
Mais même si elle avait une grande affection pour lui, Hamed savait qu’elle s’était forgée un caractère Rude. C’était une jeune femme brisée qui avait rassemblé toutes les particules cassées de son être afin de façonner la reine qu’elle est aujourd’hui. La jeune princesse s'était dangereusement endurcie.
Asrar - Hamed dites-moi, suis-je obligée de me présenter avec une robe conforme aux traditions pour cette cérémonie ?
Hamed- Rien ni personne ne pourrait jamais vous obliger à faire quoique ce soit Majesté ! Nous sommes à votre service.
Ses lèvres s'étirèrent dangereusement avant de reprendre son ton impénétrable :
Asrar - Je vous charge de me trouver une tenue dans ce cas.
La plupart du temps, ça se passait comme ça. C’est Hamed qui avait toute sa confiance.
Elle se retourna et fixa instinctivement de ses grands yeux verts Raya :
Asrar- Vous pouvez emballer vos robes!
Elle savait que cela ressemblait à un caprice mais elle savait également que Hamed saurait qu'il n'en était rien. Elle se privait volontairement des jolies choses depuis sa renaissance. Cela lui rappelait ce qu'elle n'était plus…
Ce qu'elle avait à jamais perdu : Le goût de tout, le goût de la vie.
Son quotidien ressemblait à une mauvaise blague de la vie à laquelle elle avait dû à contrecœur s'y faire. Elle ne portait pas beaucoup d'attention à ce que Les médias étrangers disaient sur elle car ils ne savaient pas par quoi elle était passée, ils ne savaient pas tout ce qu'elle avait dû subir et non plus ce qu'elle vivait au quotidien, alors elle trouvait tout à fait inutile d'essayer de se défendre ou de démentir quoique ce soit. Elle attendait patiemment qu'ils dépassent les limites ou la Titillent là où Il ne fallait pas.
Mais cela n'était pas prêt d'arriver car malgré son sexe qualifié d'inférieur, Asrar était une terreur non ternie par sa cécité. Elle marche le long des écuries et sent qu'elle était suivie de près par Raya.
Asrar- Tu as quelque chose à dire Raya?
Raya- Majesté...
Asrar- Asrar! La coupa t'elle.
Son humeur demeurait inchangé mais elle l'autorisa à l'appeler par son prénom. C'était très dangereux et Raya savait qu'elle ne devait pas déraper.
Raya- Asrar, Vous n’êtes pas sans savoir que cette cérémonie est importante. C’est la première fois que nous ouvrons en grand nos frontières aux étrangers depuis votre règne. Ne croyez-vous pas que ce serait plus adapté une tenue Royale ? Je sais que vous n’appréciez guerre l’extravagance mais les apprêts royaux sont là afin de vous distinguer, démontrer votre souveraineté mais aussi inspirer confiance.
Asrar- C'est un magnifique discours Raya.
Raya- Asrar … Pourquoi vous obstinez-vous à me compliquer la vie? Dit-elle avec rire nerveux.
La reine se retourna vers elle et ferma ses yeux.
Asrar- Insinuez-vous que je serai méconnaissable sans vêtements royaux?
Raya- Majesté, ce n’est pas ce que je dis…
Asrar- Vérifiez que tout soit prêt. Je ne veux prononcer aucun discours.
Raya- Bien ~Ma Cheikha~.
Raya avait beaucoup de compassion pour sa reine.
Oui, tout ceci était une carapace, un moyen de cacher ses blessures et sa vulnérabilité. Raya venait de titiller cette faiblesse et cela l'irrita.
Elle s'excusa puis s'en alla, peinée de voir que son amie et souveraine conservait ainsi tout en elle. S'interdisant à paraître vulnérable devant qui que ce soit.
Asrar eût un moment d'égarement... elle se perdît dans ses pensées un moment avant de rapidement se redresser afin de se soustraire à sa douleur.
Elle resta un moment à écouter les hennissements des chevaux, l'une des rares choses Qui arrivaient à lui rappeler les instants de paix qu’elle avait jadis connu.
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