Ne fuis pas !

III. Une rencontre marquante

Je sortis tranquillement de chez moi pour me rendre au lycée, encore.

Je n'en pouvais plus, j'allais craquer, je venais d'apprendre que hier encore les Loups avaient humilié John, un camarade humain de ma classe, et je n'avais pu le défendre.

Je ne mangeais pas à la cantine, non seulement parce que la nourriture était de médiocre qualité et sans aucun goût mais surtout parce que ça m'évitait un tas d'ennuis.

Je marchais en direction de ma prison scolaire, il était treize heures et je reprenais dans un quart d'heure j'avais donc largement le temps d'y aller.

Je m'arrêtai au passage piéton et attendit qu'une voiture veuille bien s'arrêter. En fait ce que j'attendais c'était qu'une voiture conduite par un humain passe par là car c'était les seuls à laisser passer les piétons.

Les Loups-garous ne se seraient jamais abaisser au niveau des pauvres petits humains que nous étions.

Je leur vouais une haine incommensurable. Autant parce qu'ils m'avaient pris mon frère et mon père, que parce que ma mère, qui d'ailleurs ne l'était plus, en était une.

Vous trouverez peut-être ça étrange mais à mes yeux ma mère est morte. Au vue de ce qu'elle avait fait, elle ne pouvait plus être considérée comme un membre de ma famille désormais inexistante.

Qu'a-t-elle fait pour mériter tant de haine et de colère ? C'est une autre histoire. Et je ne veux pas me la remémorer.

J'attendis encore quelques minutes avant de me décider à traverser malgré la circulation lupine présente.

Je traversai alors la route et un klaxon me fit sursauter, je me dépêchai donc avant qu'un Loup ne décide de sortir de sa voiture pour me démolir.

Je pensai soudain que je n'avais jamais vu l'Alpha de la deuxième meute.

J'habitais dans une ville du nom de Carson City, située dans le Nevada, elle avait la particularité d'être sur deux territoires.

J'avais déjà vu, pour mon plus grand malheur l'Alpha qui dirigeait la première partie de la ville. Seulement j'habitais dans la deuxième partie de la ville, la plus à l'Est.

Et je me rendais compte que je ne savais même pas qui la dirigeait.

Tout simplement parce que le lycée se trouvant à l'Ouest, aucun professeur ne nous faisait étudier quoique ce soit qui concerne un autre territoire que le leur.

Je continuais donc ma petite escapade dans la ville quand j'arrivai à une intersection, par pur réflexe je tournai à gauche sans regarder si quelqu'un arrivait : habituellement personne ne passait par là.

Et comme si ma vie n'était pas déjà assez compliquée comme ça, je rentrai tête la première dans un bloc.

Je savais que ce bloc c'était une personne alors je priai intérieurement pour que ça soit un humain et relevai lentement la tête.

Ma surprise fut telle que j'oubliais de m'excuser. Devant moi se tenaient fièrement quatre Loups-garous qui me regardaient avec mépris.

Je bafouillais une excuse et les contournai quand je sentis qu'on m'attrapait le poignet.

Oh non ! Moi qui pensais éviter les ennuis rien qu'une journée.

Je me retournai lentement et croisai le regard du Loup que j'avais bousculé.

Les alentours s'effacèrent lentement ne laissant dans mon champ de vision que ce regard de feu. Ses yeux étaient verts, et là tout de suite ils brillaient d'une lueur étrange, surnaturelle.

Le monde commença à tourner autour de nous comme si nous étions tous les deux sur une plaque en rotation.

Il lâcha mon poignet, trop occupé à plonger son regard dans le mien.

Je réussis à détourner le regard et la rue réapparut devant moi, tout comme les trois autres Loups qui nous regardaient bizarrement.

Mon cerveau tournait à plein régime, il me fallait trouver un moyen.

Et une idée me traversa l'esprit. Il allait parler mais je le devançai.

- J'ai une affaire très importante à régler, rejoins moi ici à 18h. Ne sois pas en retard.

J'avais mis toute l'assurance et la conviction que je possédais dans cette phrase. Il fallait qu'il y croit et pour ça je devais y croire aussi.

Je repartis et il ne dit rien, il n'esquissa pas le moindre geste.

Je courus jusque chez Lili. J'arrivai essoufflée, ce qui alarma la fleuriste.

- C'est le moment ? me demanda-t-elle.

J'acquiesçais et elle partit vers l'arrière boutique.

Elle revint avec un sac à dos.

- J'ai téléphoné à Charlie, ton avion décolle à 20h.

Je la remerciais, la pris dans mes bras, pris le sac à dos et m'en allai.

Je me retournais et la vie essuyer une larme, je lui criai que je reviendrais.

Je regardais ma montre qui indiquait treize heure trente.

J'avais donc quatre heures et trente minutes avant qu'il ne s'en rende compte.

Il me fallait faire vite.

Le bus arriva après quelques minutes d'attente, je montai dedans direction Denver, dans le Colorado.

Je m'assis le plus à l'écart possible des autres et repensai à cette rencontre.

Je n'avais pas tout de suite compris ce qu'il se passait, mais très vite mes cours me revinrent en mémoire. Du moins ce que j'avais écouté. À ce moment je me maudis. J'aurais du écouter tous les cours, aujourd'hui cela avait son importance.

Mieux connaître son ennemi pour mieux le combattre.

Je me souvenais de Mme Brich, la première professeure Loup-garou que j'avais eu.

Elle nous avait expliqué des tas de choses sur son espèce et c'est d'ailleurs la seule que j'appréciais, car étonnement elle ne valorisait pas particulièrement les siens, elle les mettaient au même niveau que les humains, ce qui m'intéressait d'autant plus.

Je me souvins du jour où elle nous avaient parlé des Âmes-sœurs.

À la fin de ce cours toutes les filles de ma classe étaient allées regarder chaque garçon dans les yeux.

D'après Mme Brich c'était une chose merveilleuse de rencontrer son âme-sœur.

Une légende disait que la déesse de la Lune était la mère des Loups-garous. Cependant, un loup du nom de Ynös était malheureux : les gens le traitaient de monstre et il se rendait compte qu'il ne trouverait jamais de compagne. Or pour les Loups la présence d'une compagne est primordiale. Alors triste de voir un de ces enfants seuls, elle créa une louve-garou et réunit leurs âmes pour n'en faire qu'une.

Alors quand Ynös rencontra cette personne, il ne put plus s'en séparer et ils finirent leurs vies ensemble.

Depuis la déesse Lune unit l'âme de chaque Loup à une autre âme, celle-ci pouvant appartenir à un Loup ou un humain, personne n'étant à l'abri. Tous n'ont pas la chance de rencontrer leur âme-sœur. Et quand il la rencontre, un lien sacré se forge et le Loup ne peut plus se séparer de son âme-sœur. Si celle-ci meurt le loup, meurt quelques temps après.

J'avais donc compris que cette fichue déesse m'avait unie avec un Loup.

Je maudis la déesse de la Lune !

Je refusais de devenir la compagne de cet animal, de ce monstre, de ce Loup !

Je l'ai sûrement déjà dis mais je les hais du plus profond de mon cœur, tous autant qu'ils sont. Alors il est hors de question de devenir sa femme ! Ou quoique ce soit d'autre que son ennemi.