Problematic

 Point de vue de Nassim.   Scarface , un fils du rappeur Booba retentit à fond dans ma caisse. J'allume un joint pour fêter ça. - Baisse le son enfoiré! s'écrie mon pote Mam's au bout du fil. - C'est mort, dis-je en faisant exprès d'augmenter le volume de la musique.      Aujourd'hui, c'est un jour tranquille: y a le soleil, y a la musique, y a des gazelles chargées dans tous les coins de rue ... Si après cette journée je suis pas trouvé un plan pour ce soir, c'est que je suis vraiment un bouffon. De toute façon je m'inquiète pas trop: depuis le temps, j'ai appris à savoir ce que les gazelles recherchent chez un mec. Il suffit qu'il soit mauvais et dur mais pas trop, qu'il fasse des conneries mais qu'il sache sortir des bonnes disquettes et le tour est joué, elle fait le coup des beaux yeux et ouvre facilement les cuisses. Personnellement, je m'intéresse rarement aux filles que je b***e voiture leur vie personnelle m'importe peu. En vrai, je m'en bas même royalement les couilles. Pour autant, je sais commente-moi avec elles pour les avoir à mes pieds. - Nan sérieux éteint ça! Gueule Mam's. C'est beaucoup trop fort. - Raccroche si t'es pas content. Je préfère élargir le couplet de Booba à vendre voix, dis-je en m'esclaffant.    Mam's est mon pote depuis le collège. Ça fait donc plus de dix piges que je le connais. C'est avec lui que j'aie commencé à faire les conneries, et c'est avec lui que je les finirai. On peut s'insérer sans limite sans que l'un de nous deux se vexe, et c'est ça que j'aime bien chez ce con. Il peut tout me dire, je le prends toujours à la rigolade. Sauf s'il parle de ma mère. Mais les vrais ne parlent jamais de la famille, ils le savent. - Bon je te laisse petit enfoiré, j'ai un truc à faire, reprend-il. - Une fille? - Peut-être bien que ouais.    Le veinard! - Allez, tire-toi et profite bien de ton coup, rigolé-je.     Nous nous marrons encore quelques secondes puis je raccroche le premier ministre. Un même moment une meuf avec des putains de formes passe devant ma caisse. Elle est habillée simple, mais je sens d'ici son côté fille facile. Parfait! Je klaxonne pour qu'elle se retourne, et c'est ce qu'elle fait. - Eh! Tu vas où comme ça? je lui demande en faisant mon petit regard charmeur.     Avec ce genre de meuf, je sais direct qu'il faut passer à l'attaque sans s'éterniser. Pas de vouvoiement, ni de courtoisie. Les trucs comme ça c'est pas pour les mecs comme moi sa mère. - Je dois aller voir une pote à moi, tu m'emmènes? dit-elle tout de suite.     Elle s'approche déjà de ma voiture. p****n, mais c'est qu'elle est hyper chaude celle-là. Toi je vais faire qu'une bouchée de ta ... - Aaaaaaaaaaah!    Un cri strident résonne dans toute la rue. C'est quoi ce délire? Qui ose n****r mon plan de ce soir? La bombasse qui s'apprêtait à monter dans ma caisse se retourne de l'autre côté de la rue et plaque à main sur la bouche. Je passe ma tête dehors, curieux et aperçois au loin une nana en jean et talons avec une chemise blanche qui s'agite dans tous les sens, à la recherche de quelque chose qui se trouve visiblement sur la route. Une voiture, peut-être? - Tu la connais? fais-je à la bombasse. - Nan. Je traîne pas avec les folles comme ça, réplique-t-elle en toisant l'inconnue du regard.     Ah les filles ... Je ne comprendrai jamais pourquoi elles se font toutes les guerres alors qu'elles ne se connaissent même pas. - Bon, tu m'emmènes, oui ou non? insiste-t-elle en ouvrant la portière côté passager.     Son ton est limite insolent. Beyoncé, j'ai vraiment envie de te prendre (dans tous les sens du terme) mais je crois que j'ai une autre idée ... - Laisse tomber, lui dis-je d'un geste de la main. On se voit un autre jour, je viens de me rappeler que j'avais quelque chose d'autre choisi à faire. Je démarre sans lui laisser le temps de percuter mes mots, la laissant en plan comme une conne sur le trottoir. Mon acte me fait passer pour un s****d, mais elle sait aussi bien que moi que je ne la rappellerai pas. Je n'ai même pas pris son numéro !    Mais tant pis. De là où je suis, ma nouvelle proie à l'air encore bien plus appétissante. Point de vue de Rachel.       C'est la catastrophe assurée. Ma sœur va accoucher dans moins d'une demi-heure et je n'ai toujours pas trouvé de moyen de transport rapide pour rejoindre l'hôpital. En d’autre terme, je suis à la bourre. Mon Dieu, faites que je sois arrivée avant que le bébé naisse ! Je sais que Sandra tient absolument à ce que je sois présente lorsqu'elle mettra au monde son enfant. Elle n’a que moi, vu qu'un certain connard a préféré l’abandonner pour se tailler dans un autre pays… Oui, ça craint au max.    Il y a maintenant un quart d'heure, j'ai appelé un taxi pour qu'il passe me prendre dans ma rue. Il m'a assuré qu'il serait là à l'heure, mais il ne s'est toujours pas pointé. Cerise sur le gâteau : pendant que j'attendais comme une pauvre abrutie sur le bord de la route, un gars en vélo m'a rentré dedans et a fait tomber toutes les affaires qu'il y avait dans mon sac. Argh ! Je crois que je vais péter un câble.    Dépitée, je me baisse pour tout ramasser. —   Un problème ?     Je relève la tête avec nonchalance : un gars aux cheveux mi-longs plaqués en arrière et au teint hâlé se trouve dans une BMW noire garée juste en face de moi. Il parle à qui, celui-là ? Avec son sourire qui le rend plus arrogant qu'autre chose... Oh non ! Non, non, non et non ! J'ai compris, je vois le genre. Hélas pour lui, je n'ai pas du tout la tête à me faire draguer par un gars. Surtout par un gars comme lui, qui plus est.    En somme, je décide de ne pas lui répondre et je continue ce que j'étais en train de faire, non sans lui glisser quelques petits regards furtifs histoire de voir s'il s'en va ou non. —   T’as besoin d'un chauffeur ? relance-t-il, manifestement déterminé à jouer son petit numéro.     Soudain, quelque chose me fait tilt. Si j'étais un personnage de BD, il y aurait sûrement une ampoule au dessus de ma tête à ce moment-là de l'histoire. Je me dépêche de ranger mes dernières babioles puis m'approche de sa voiture. —   Tu es taxi ? je m’enquiers bien que je sois peu convaincue. —   Non. —   Uber ? je tente alors —   Non plus, dit-il amusé.     Ai-je vraiment l'air de vouloir plaisanter avec quelqu'un, là, tout de suite ? Espèce de tocard, va. —   Bon alors dans ce cas qu'est-ce que tu me veux ? fais-je le moins aigrement possible.    Si je dois arriver à l'heure pour l'accouchement de ma sœur, je devrais plutôt l'amadouer, non ? Même si Dieu sait que je me force à le faire. —   T'avais l'air un peu à l'affût, se défend-t-il, alors je me suis dit que tu cherchais quelqu’un. —   Tu me surveillais ? —   Peut-être bien, plaisante-t-il en retirant ses lunettes de soleil.     Humm. Maintenant que je vois ses yeux bruns, c'est vrai qu'il n'est pas si mal que ça... Dans le genre ténébreux, sexy et attirant, il marque des points.     Mais bref, aucun rapport avec mes idées de départ. —   Écoute, dis-je. Pour le moment, je n’ai pas le temps de réfléchir si tu es un psychopathe, un violeur ou un truc dans le genre, donc je vais être honnête avec toi : je dois impérativement arriver à l'hôpital d'ici un quart d'heure, alors si tu n'es pas occupé et que tu as le cœur sur la main, je te demanderais de bien vouloir m'y emmener. Je ferais tout ce que tu veux, mais s'il te plaît, emmène-moi là-bas ! —   Tout ce que je veux ? souligne monsieur beau-gosse. —   Oui !... Non ! me rattrapé-je en voyant son regard rempli de sous entendues. Argh ! Tu es pénible, comme gars ! —   C'est pas ce qu'elles me disent en général… —   Bon, c'est bon, j'ai compris, je vais me chercher un autre chauffeur. Oublie ça.     Je fais mine de m'en aller et il s'écrie aussitôt par la fenêtre : —   Attends ! Je rigolais, Gazelle ! Je veux bien t'emmener, allez, monte.     Gazelle ? Il vient vraiment de m'appeler Gazelle ? Bon, ce n'est rien, me dis-je. Dans même pas dix minutes, tu seras déjà sorti de sa voiture. Je fais volte face et monte sur le siège passager, non sans afficher une mine peu amicale. De la musique s'échappe sur les côtés du véhicule : du Booba, je crois. Je ne suis pas certaine, car le Rap ce n’est pas trop mon truc. Moi je suis plutôt RNB, Pop, ou même Rock, mais pas Rap. Surtout pas Rap, en réalité. —   Attache ta ceinture. J'aimerais pas qu'on se fasse arrêter par les flics, quand même, fait le type avec un énième clin d'œil. Bon Dieu, je sens que le trajet va être long...