Chapitre 6

1692 Words
Trois semaines plus tard.   Point de vue de Tarek.   J'en reviens pas. Mon frère, Nassim, alias celui qui se tape toutes les meufs du coin sans jamais les rappeler, est enfin posé avec une meuf. Je sais pas si c'est sérieux. Je sais même pas de quoi elle a l'air. Mais quand il nous a parlé d'elle, j'ai compris directe qu'il était intéressé par elle. Et c'est une première, car il ne s’est jamais mis en couple. Ouais, ce con a vingt-cinq piges et il était même pas foutu de se trouver une vraie go jusqu'à maintenant. N’empêche je suis content pour lui, espérons que ça soit sérieux jusqu'au bout et que ça dure pour eux.    Personnellement, mon passé sentimental est plus complexe. Il y a six ans de ça j’étais avec une fille. On avait des projets ensemble mais elle a finit par me lâcher. Du coup après ça j’ai commencé à butiner à droite à gauche, pour le fun et surtout pour le cul. Aujourd’hui j’ai un autre but ; j’approche bientôt de la trentaine alors je dois arrêter avec ces conneries. Certes je fais encore des choses pas très bien et je respecte pas ma religion à la lettre, mais avec les filles ça fait plusieurs mois que j’essaie du mieux que je peux de trouver la bonne et fonder une famille.    Sauf que c’est super dur à réaliser. Avant c'était moi qui les faisait galérer, mais maintenant ce sont elles qui se foutent de ma gueule en voulant que mon fric. Cette situation me fait chier. —   Tu as des étoiles dans les yeux, observe Mam's en fixant Nassim depuis le canapé de mon salon. —   Ta race, réplique l'autre con en se servant un verre de Fanta. —   C'est quand que tu nous la présente ? demandé-je. Mon frère se tourne vers moi, surpris. —        Euh... J'sais pas. Tu veux la voir ? —        Moi oui ! s'extasie Nasser avec un air pervers. —        Toi tu dégages. Nympho comme t'es tu la baiserais avec un seul regard. —   Nassimou serait-il jaloux ? —   Déjà, je t'ai dit que tu devais arrêter de m'appeler comme ça. Ensuite non, j’suis pas jaloux. C'est juste que chacun a ses bails, donc pas touche. Nasser me lance un regard complice et je hoche la tête. —   Tu es jaloux, j'approuve à l’adresse de mon frère. —   Oh que oui, renchérit Nasser. —   De toute façon qu'est-ce que ça peut vous foutre ? C'est ma life, cassez pas les couilles. —   Oh, il s'énerve pour sa dulcinée, le charrie Mam's en tirant sa taffe. Que c’est mignon !     Nassim lui répond simplement par un doigt d'honneur. Cet imbécile est borné, il veut jamais assumer les choses. Mais en même temps, je le comprends un peu. C'est comme si je leur disait que la fille de l'épicerie m'avait tapé dans l'œil. Et ça c’est mort. Les trucs comme ça se dise pas entre mec, point barre. —   Ah, on m'appelle. Je vous laisse, les gars, dit Nassim en se levant. —   C'est ça. Passe-lui le bonjour et dis lui que je l'aime aussi, lui lance Nasser d'une voix de tapette.     On se marre tous, sauf Nassim, qui a l'air plus soûlé qu'autre chose.   Point de vue de Nassim.      J’attends d’être enfermé dans ma chambre pour décrocher le téléphone. J’éclaircis ma voix pour lui donner un ton séducteur. —   Salut Gazelle. Ça va ? —   Oui et toi ? J'entends un cri féminin résonner au bout de la ligne. —   Ta pote ? j’insinue. —   Ouais... Désolée. Tu fais quoi, beau-gosse ?     J'aime quand elle m'appelle comme ça, car j'aime entendre la vérité sortir de sa bouche.—   Je suis avec des potes, on compose un nouveau morceau. Et toi ? —   Je m'ennuie...      Ça, c’est clairement un appel de phare. Vaut mieux que j’en profite avant qu’elle ne change d’avis. —   Tu veux que... —   Oui, dit Rachel avant même que je finisse ma phrase.      Pas le temps de blablater, je raccroche et pars prendre ma veste à l'entrée de l’appartement. —   Où tu vas ? m'interroge Tarek, douteux. —   Je vais chez quelqu'un. M'appelle pas, je rentrerai demain.     Et je sais qu'en disant ça, il a compris où je me rendais. J'ai un sourire énorme collé aux lèvres. Ce soir, j'en connais un qui va enfin pouvoir tirer son coup !    Point de vue de Rachel.       Nassim arrive chez moi en un temps record. C'est lorsqu'il franchit le pas de ma porte que je remets tout en question. Je l'ai fait ramer un certain temps avant qu'il puisse toucher mes hanches et mes fesses quand on s'embrassait, et je sais qu'aujourd'hui il en attend plus de moi. C'est pas que je ne suis pas d'accord : moi aussi, j'ai envie de le faire. Vraiment. C'est juste que j'ai peur qu'il me jette comme une merde après ça. Il est évident qu'il est pressé de m'avoir dans son lit (enfin dans le mien, si on le fait ce soir...) et que j'ai envie de lui faire du bien, parce qu'il le mérite pour m'avoir attendu, mais j'ai quand même un doute. Ce mec est vraiment bizarre : les premières minutes passées avec lui sont ennuyantes à mourir, puis à force on finit par vouloir le voir encore et encore. Je crois que je m'emballe trop vite, et je n’aime pas trop ça.    En fait, ce qui me fait le plus peur, c'est que ça finisse comme avec Samuel.    Samuel, c'est mon ex. Le premier et le dernier mec que j'aie eu jusqu'à présent. Je lui ai tout donné, je l'aimais comme une folle. Mais ce connard m'a trahi de la pire des manières en me trompant avec mon ancienne meilleure amie Tara Rocher. Punaise, j'aurais dû lui dire qu'elle se tapait un nom de merde avant de lui foutre ma main dans sa gueule. Samuel aussi a récolté une baffe. Ils le méritaient tous les deux. Grâce à Dieu aujourd'hui je n'ai plus de nouvelle d’eux et tant mieux ! Je suis passée à autre chose depuis un bail. —   Tu es toute mimi, me complimente Nassim une fois installé au salon. Je souris et rougis. —   Alors comme ça je te manquais ? rit-il. —   Un peu... pas trop non plus, te fais pas d’idée. —   Mouais. Je lui sers un verre de vin et bois une gorgée dans le mien. Un ange passe. —   Euh…     Il ne termine pas sa phrase. C'est gênant, aucun de nous ne sait comment faire les choses. Ça me plaît. Ça veut dire qu'il n'est pas affamé, et qu'il peut se montrer patient encore une fois.    Je me lève et repose le verre sur la table, puis m'approche de lui et me mets à califourchon sur ses jambes. Il est tellement pris au dépourvu qu'il en fait tomber son verre vide sur le canapé. Sans un mot, j'appuie mon corps contre le sien et dépose mes lèvres sur le lobe de son oreille. Pour être honnête, je ne sais pas du tout ce que je suis en train de faire. J'agis spontanément. C'est limite si mon corps parlait à ma place et que j'étais spectatrice de la scène. Ma bouche glisse le long de son cou, remonte sur ses lèvres sur lesquelles je m'attarde un long moment. Nassim grogne et me renverse sur le canapé pour se retrouver sur moi. Alors ça, ce n'était pas du tout prévu.    Ses yeux dilatés et reflétant le désir se posent sur mon corps. Je relève sa tête pour qu'il me regarde moi. Mon visage. C'est ça qu'il doit regarder en premier, le reste c'est pour après. Nassim me rend mon b****r un peu plus sauvagement et défait mon soutient gorge par-dessus mon t-shirt. Je note le niveau d’expérience dont il fait preuve. Il a dû faire ça tellement de fois !    Aucun autre mot ne sera prononcé durant toute la nuit. Je l'ai emmené dans ma chambre, et comme prémédité, il s'est passé ce qu'il devait se passer. C'était bien, c'était bon. Il a su savoir prendre les devants et m'envoyer loin. Avec toutes les belles paroles qu’il m’a sorti pour m’avoir, il n'avait pas le droit à l'erreur.    Bref : j’ai officialisé avec un mec de cité.   Point de vue de Tarek.      Normal. Tranquille. Au calme. Le mec s'est tiré chez sa meuf et nous a laissé plantés là, à finir le taf à sa place. Il sait très bien que l'inspiration pour écrire mes paroles a dû mal à venir quand je suis pas avec lui. Tant pis, si je fais un mauvais couplet je remettrais la faute sur lui.    Mais p****n. J'ai pas le droit de dire ça. C'est mon frère, et il a l'air heureux. Pourquoi je fais l'égoïste, comme ça ? Je devrais plutôt être rassuré de voir mon petit frère aller dans le droit chemin. Je connais même pas la meuf mais je sais pas, mon intuition me dit que c’est une fille bien qu’il lui faut vraiment. Je l'espère, en tout cas. Les anciennes fréquentations de Nassim étaient soit faciles, soit mal polies, soit trop connes. J'ai jamais pu m'entendre avec aucune d’entre elles. D'ailleurs je crois que c'est aussi grâce à moi qu'il s'est débarrassé de certaines. Il a beau faire le mec caractériel, des fois c'est dingue comme il peut être aveugle ce con. —   Bah alors, Tarek ? demande Nasser. —   Quoi ? —   C'est quoi cette tête ? —   Quel tête ? je me hasarde. —   J'sais pas. On dirait que t'as l’air ailleurs. Tu penses à quoi frérot ?    Lui parler de ce qui est en train de me passer par la tête est inenvisageable. C’est entre moi et moi seulement, c’est pourquoi je préfère opter pour le mensonge. —   Rien d’important Nasser. T’en fait pas. —   Comme tu veux mon gars.     J’allume une clope et tire une latte. Puis deux, puis trois… Jusqu'à ce que la nicotine me dégoûte et que j’écrase cette daube dans le cendrier.     Je suis dans le mal. Le problème, c'est que la fille de l'épicerie n'arrête pas de me hanter l’esprit. Je comprends pas. Je l'ai vu qu'une fois il y a presque un mois mais je n’arrive toujours pas à l’oublier. Je déraille. C’est relou.     Note pour moi même : l’effacer une bonne fois pour toute de ma mémoire et trouver une autre meuf. Bonne et jolie, si possible. Ah bah si, quand même.  
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