Point de vue de Nassim.
C'était... c'était... original. Ouais voilà : c'était original. Je l'ai fait des tonnes de fois avec des meufs différentes, mais l’avoir fait avec Rachel est sortie du lot. J’ignore la raison et honnêtement, je m’en tape un peu. Le principal c’est que j’ai passé une très bonne nuit.
Par contre, le matin était un peu moins bien. Je n’ai pas l’habitude de dormir avec une nana du coup quand je me suis réveillé, je n’ai pas perdu de temps pour remettre mes fringues et repartir chez moi. Je crois que Rach aurait voulu que je reste plus longtemps avec elle dans le lit, mais vas-y, je suis pas le père Noël, j’offre pas des cadeaux sur commande.
A la casa Nasser est encore là, à moitié à poil sur le canapé en train de manger des chips. Tarek est pas loin, la tête rivé sur l’écran de son portable. A peine je m’assois à côté de Nasser qu’il me mitraille de questions.
— Alors, c’était cool ?
— Ouais.
— Vous avez baisé ?
— A ton avis ?
— Elle était belle ?
— Hein ? Comment ça ?
— Je te parle au réveille. Tu sais parfois on tombe sur de très mauvaises surprises...
Mon frère Tarek rit dans sa barbe. Il est taré ce mec. Qu'il se trouve une meuf au lieu de me les briser.
— Tu fous la haine avec tes questions, n***e ta race et tire-toi de là ! dis-je à Nasser. C'était pas aujourd'hui que tu devais aller rejoindre ta daronne ?
— Je vais y aller, confirme-t-il d’un revers de main. Attends, je rêve ou tu veux te débarrasser de moi ?
Oh le con. C'est maintenant qu'il réalise le truc ou quoi ?
— Bien sûr que je veux me débarrasser de toi. On a des trucs à faire avec mon frère, donc habille-toi et sors, tu fais mal à la tête bêtement.
Nasser dit deux trois mots à Tarek tout en enfilant son pantalon et son t-shirt puis se taille en riant. Comme d'habitude quoi.
— Ah, enfin tranquille, soufflé-je en fermant la porte.
Tarek range son portable dans sa poche et se rapproche de moi.
— Tu pourrais au moins me dire son prénom, tu sais.
— Eh gros, tu vas pas t'y mettre toi aussi ? je grommelle.
— C'est juste un nom frère. Arrête de faire l'homme d'affaire.
Je lève les yeux au ciel. Dis comme ça, il a pas tort…
— Rachel.
— Rachel ?
— Rachel, ouais.
Tarek réfléchit un instant, avant de hausser un sourcil.
— Elle est juive ?
— Non. Espagnole et marocaine.
— Et la religion ? Elle est quoi ? insiste-t-il.
— Je sais pas moi !
C'est vrai, qu'est-ce que j'en sais ? On s'en fou, non ? C'est pas comme si je comptais me marier avec elle...
— Fait attention, achève mon frère.
Nous nous remettons à l’écriture de nos textes.
Point de vue de Rachel.
— Tu es amoureuse ! s'écrie Nadia dans tout l'appartement.
— Pas du tout ! Tu es vraiment dans l'extrême.
Et c'est vrai, elle abuse vachement. Je ne peux pas tomber amoureuse d'une personne en seulement trois semaines de relation, c'est impossible. Il y a peut-être des sentiments qui commencent à naître, mais rien de bien officiel et d'aussi important.
— Si t’es pas amoureuse, pourquoi tu souris depuis trois heures ? veut savoir Nadia, un sourcil levé.
Hein ?
— J'ai pas le droit d'être heureuse ? dis-je en la dévisageant.
— Si, bien sûr. Mais y a bien une raison ! Et je suis sûre que c'est pour un gars. Laisse-moi réfléchir : ça ne serait pas le type du taxi, là ? Nassim ou je ne sais plus trop quoi ?
Pour toute réponse, mon sourire s'intensifie. Chiotte.
— J'avais raison ! C'est lui ! s’exclame mon amie. Tu vois, je t'avais bien dit que c'était un signe du destin.
— T’es chiante.
— Tu l'es encore plus. Bon, sinon, t’as baisé ?
Je m'étrangle avec mon verre de jus d'orange.
— Mais ça va pas ? Fait attention à ton langage, mademoiselle !
— Non mais sérieux, vous l'avez fait oui ou non ?
Je ris comme une idiote et lui réponds, un sourire en coin :
— C’était sympa quoi…
— Ahahah ! Chanceuse. Moi ça fait des lustres que mon vagin attend une visite.
Nadia a le don de sortir des choses aussi loufoque. C'est dans ses gènes, je crois. Parce que même sa sœur que je connais bien, Nina, est aussi directe et spontanée dans ce domaine.
— C'est quand que tu nous le présente ? ajoute Nadia en redevenant plus sérieuse.
— Qui ça « nous » ?
— Bah, Nina et ta sœur Sandra !
Ouh là. Je n’ai jamais songé à cette éventualité. J’ignore si Nassim serait d’accord pour rencontrer mon entourage, et vice-versa.
— Je vais en parler avec lui et on verra, OK ?
Je me garde bien de lui dire que je ne suis pas encore prête pour ça. On sait jamais, des fois qu’elle ferait ses recherches elle-même…