Le lycée et l'amitié

2938 Words
  Cela fait quelques minutes que je suis dans mon bus et je suis encore folle de rage contre ce Steven. Je regarde par la fenêtre du bus et fixe le décor qui défile devant moi. Un paysage que je vois à peine, à cause de mon état. Je suis tellement exaspérée que je ne remarque que maintenant le reflet de mon visage et je me dis : La vache il a dû bien rigoler l’autre abruti. J’essaye tant bien que mal de me recoiffer,  et sors finalement mon miroir. Je veux voir si mon maquillage n’a pas trop coulé. Je découvre que je suis rouge comme une tomate et me rends compte que j’ai bien transpiré. “Allez, Éléonore, arrête de te mettre la pression. Tu es dans ce bus, tu vas pouvoir faire ta rentrée correctement”. Une voix me sort de mes pensées. -       Je suis désolée de l’attitude de mon frère.  “Non, ne me dites pas qu’elle a osé se placer à côté de moi… Je tourne la tête et j’aperçois la sœur de l’autre abruti”. -       C’est plutôt moi qui suis désolée. -       Pardon, dit-elle avec un regard d’incompréhension. Je lui dis avec humour. -       Je suis désolée, car malheureusement pour toi c’est ton frère. Je vois à sa tête que ma petite touche d’humour a fait plutôt mouche. Son regard se plisse et sa tête se penche sur le côté gauche. Elle donne l'impression de réfléchir.  “Mais pourquoi l’ai-je encore ouvert, ce n’est pas de sa faute si son grand frère est un imbécile. En plus, elle a l'air d'être plutôt cool, pas comme l'autre abruti". Je vais pour m'excuser quand elle me coupe la parole. -       Elle est trop bonne celle-là. C’est vrai que je suis dans la m***e, me dit-elle en rigolant. Je la regarde à mon tour avec beaucoup d’incompréhension.  Elle rigole tellement qu’elle a du mal à reprendre sa respiration. D’ailleurs, tout le bus nous fixe. Elle se tape dans les mains et me met de temps en temps des petites tapes dans l'épaule. Elle n'arrête pas de me dire que je suis trop marrante. Première fois qu'on me dit ça et j'avoue que c'est assez agréable à entendre. Je suis assez étonnée de la voir ainsi, mais plus je la regarde et plus cela me plaît de la voir ainsi.  Ça me plaît tellement, que je ne joins à elle. Entre deux fous rires, je le lui demande. -       Comment t’appelles-tu ? -       C’est Tricia et toi ? -       Éléonore. Je la vois récupérer doucement son sérieux. -       Éléonore, tu ne peux pas imaginer le plaisir que j’ai pris en te voyant parler ainsi à Steven. Quand elle m'annonce ça, elle avait sa main droite sur mon épaule gauche. -       Pourquoi, tu ne t’entends pas avec ton frère ? Tricia secoue la tête de gauche à droite et me dit. -       Non au contraire, on s’entend très bien et j’adore mon frère, mais c’est vrai que je n’en peux plus de voir tous ses faux culs avec qui il travaille. Et je la vois imiter un collaborateur de son frangin. -       Bien sûr, Monsieur Daniel’s, vous voulez un café, un verre d'eau, Monsieur Daniel’s… Bientôt, il va le suivre aux toilettes pour lui essuyer le c*l. Je rigole devant son imitation et ma nouvelle amie se joint à moi. C'est tellement drôle de la voir faire les gestes d'une personne qui donne une tasse et ensuite un verre d'eau. Et puis ce qui est hilarant c'est la voix qu'elle prend. Tricia continue de me dire. -       Alors, te voir lui tenir tête et ensuite lui faire des doigts a contribué à ce que ma journée soit parfaite. -       Est-ce que ton frère sait que je ne suis pas un de ses collaborateurs ? -       Maintenant, il est au courant, même si au début j’ai cru que tu allais perdre tes moyens, ajoute-t-elle avec un sourire. "C'est vrai que lorsqu'il s'est tourné vers moi, j'ai ressenti une sensation que je n'ai jamais ressenti. Je serai incapable de le décrire, mais j'ai aimée ça. Je revois ses yeux d'une beauté incroyable et puis il n'y a pas que c'est yeux qui son incroyable... Mon Dieu qu'est-ce qu'il m'arrive ? Pourquoi mes joues sont brûlante ? J'ai chaud d'un coup." -       Éléonore, tu es toujours avec moi ? Tricia me regarde avec un sourire ce qui me fait comprendre qu’elle a deviné mes pensées. Elle me lance un regard qui veut dire : je vois que le corps musclé de mon frère ne te laisse pas indifférente. Vous savez ce petit regard malicieux que l'on peut avoir quand on découvre qu'un ami proche est amoureux. Vous voyiez ? Et bien, c'est exactement celui-ci que Tricia a sur moi. -       Bon, ok, j’avoue que ton frère est canon. -       Je n’ai rien dit, ajoute Tricia en souriant. -       Arrête, ce n’est pas drôle de se moquer, j’avoue juste qu’il est mignon. Le bus arrive devant le lycée, ouf sauvé par le gong. -       Au fait, quelle filière suis-tu ? demande-t-elle. -       Comptabilité et toi ? -       Le droit. Je ne peux m’empêcher de rire. Si mon géniteur était présent avec nous, il n'aurait pas arrêté de faire des remarques désobligeantes. Je l'entends dire : Voilà quelqu'un de sensé, Eléonore tu devrais prendre exemple sur ton amie. Franchement faire comptabilité, c'est vraiment n'importe quoi. -       Tu serais la fille parfaite pour mon père. Elle m’interroge du regard. Je me lève de mon siège et lui dis : -       Plus tard pour les explications. Notre première journée de lycéenne commence maintenant. On se voit ce midi et ce soir pour rentrer… Tricia acquiesce et me suit pour descendre du bus. Nous posons les pieds sur le trottoir et là on en prend plein les yeux. Devant nous se dressent plusieurs bâtiments, qui sont en forme de U. Ils sont immenses. On avance vers l’entrée du lycée  et entre à l'intérieur de la cour sans rien dire. Au milieu se trouve un parc ou plusieurs personnes sont installés. C'est l'endroit idéal, ou il faut aller quand il y a permanence. Les regards que nous échangeons suffisent à se comprendre. Des étoiles scintillent dans nos yeux, car un Nouveau Monde s’offre à nous.  “Quelle chance pour moi, enfin quelque chose de bon !”         Avec Tricia nous partons vers le réfectoire pour l'annonce de nos classes. Tricia est appelé tout de suite et part quelques minutes après avec ses camarades. Mais juste avant ma nouvelle amie me lance un regard qui dit : on se retrouve soit à la cantine ou dans le bus. L’aventure lycée commence maintenant.  Quelle journée ! Je n'ai pas eu une minute à moi depuis le début des cours. Entre les infos de chaque prof et mes nouveaux camarades, je n'ai pas eu le temps de souffler. Ce midi j'ai tenté d'apercevoir Tricia, mais peine perdue. Peut-être que nous n'avons pas les mêmes horaires. Il est 17 h 45 et je sors du lycée. Je m’avance dans la direction des arrêts de bus. J’entends quelqu’un derrière moi courir et plus les pas se rapprochent et plus je comprends qu’une personne m’appelle. -       Éléonore attend-moi ! Je me retourne pour apercevoir Tricia se précipiter vers moi. Un sourire se forme sur mon visage, car je suis heureuse de la voir. -       Ah, je suis… contente… de te voir, commence-t-elle à me dire. -       Calme-toi, reprends ton souffle. Viens suit moi. On avance tranquille vers notre bus ce qui permet à Tricia de reprendre sa respiration et de continuer à me parler sans manquer d’air. -       Ce midi, j’ai essayé de te voir, mais je pense que nous n’avons pas les mêmes horaires. -       J’ai mangé au premier service. -       Oui, c’est pour ça qu’on ne se voit que maintenant. Moi, j’étais au deuxième service, me dit-elle. Je vais pour lui demander son service pour demain, mais elle continue dans sa lancée. Ma nouvelle amie est donc une pipelette. -       C’est dommage, j’avais plein de choses à te dire, dit-elle avec un grand sourire. Je lui lance un regard qui veut dire : quoi, vas-y balance. -       Dans ma classe, il y a un mec, c’est un vrai canon. Je suis raide dingue de lui. Je me mets à rigoler et Tricia ajoute. -       Pourquoi rigoles-tu ? -       Tu m’as couru après… j'essaye de reprendre mon sérieux pour continuer de lui dire… comme une malade, pour me dire qu’un mec canon est dans ta classe. Tricia, juste à titre d'information, on aurait dit une folle à courir ainsi. -       C’est important d’avoir un mec canon dans sa classe. Bon, j’avoue que ce n’est pas non plus l’annonce du siècle, mais quand même, c’est crucial de pouvoir observer sa proie, dit-elle avec un grand sourire. Je souris avec elle, mais je ne peux m’empêcher de me dire que cette demoiselle est complètement différente lorsqu’elle est avec son frère. -       Tricia, tu me fais trop rire. Je peux te poser une question ? Elle acquiesce de la tête. -       Ne le prends surtout pas mal, mais pourquoi lorsque tu es avec ton frère, tu es différente ? Je vois ma nouvelle amie faire une petite moue et je comprends que j’ai touché juste. Un peu comme moi si on me questionne sur mes parents. -       Ouais, je sais, je n’arrive pas à être moi-même quand mon frangin est là, me dit-elle avec un peu de tristesse. -       Pourquoi ? C’est dommage de vouloir être une autre personne, surtout quand celle-ci est déjà magnifique. -       Éléonore, je me rends compte que c’est pitoyable de ma part, mais c’est plus fort que moi. Quand je suis avec mon frère, il faut que je fasse comme tous ces ploucs qui lui lèchent les bottes. Je n’arrive pas à être l’ado que tu vois au lycée. Il faut que je fasse la fille de bonne famille. La jeune qui a 20 ans alors qu’elle en a 16 ans. Je fais un geste de la tête qui signifie que je comprends tout à fait. -       Tricia, je sais très bien ce que tu ressens. J’aperçois le visage de mon amie qui se déforme légèrement pour me dire qu’elle n’y croit pas du tout. -       J’ai vécu la même chose avec mes parents. J’ai fait semblant à une certaine période. J'ai joué à celle que mon père voulait voir. Tout ça pour quoi ? Pour avoir un peu d’amour de leur part... Tricia me coupe la parole. -       Mais moi, je sais que mon frangin m’aime. -       C’est sûr ça se voit que ton frère t’aime. C’est un abruti, mais il t’aime. Elle sourit à ma remarque. -       Tricia c’est une raison de plus pour ne pas faire semblant. Sois toi-même. Ton frère t’acceptera tel que tu es. On monte pour s’installer dans notre bus. Tricia s’installe côté vitre et moi, je me pose à côté d’elle. -       C’est quoi le problème avec tes parents ? me demande-t-elle. Je soupire, car je n’aime pas parler d’eux. Je sens son regard sur moi, elle attend que je parle, mais est-ce que je suis prête à me livrer. Je sens que je peux lui faire confiance. -       Le problème, c’est surtout avec mon père. Il souhaite tout contrôler. Il a fait ça avec ma mère et maintenant elle est méconnaissable, une vraie épave. C’est pourquoi je ne fais plus ce qu’il veut, je suis ma propre voix. Je vois Tricia hocher la tête. -       Mais malgré ça, il t’aime toujours ? Je lâche un petit rire et lui réponds -       On ne peut pas vraiment dire ça. Je déclarerais plus qu’il me tolère et encore c'est pas sûr. D’ailleurs, je dirais même qu’il ne m’a jamais aimé. Il n’aime que lui. -       Mais c’est affreux, comment est-ce possible d’avoir des parents ainsi ? Je lui réponds avec un petit sourire de tristesse. Ce genre de sourire où l’on ne veut pas montrer que nous sommes tristes et que les larmes nous chatouillent le coin des yeux. -       Je ne sais pas Tricia, mais c’est comme ça. Dans mon malheur, j’ai deux adorables personnes qui sont pour moi mes parents de cœur. Lydia et Alfred. En pensant à eux, mes larmes disparaissent et j’ajoute. -       Et je suis sûre qu’ils seront toujours présents pour moi, même si je fais quelque chose de mal. Et ton frère fera la même chose, pour toi. Tricia me regarde avec un regard grave, un peu comme si elle était triste pour moi. Elle acquiesce de la tête. Je sens notre bus ralentir. Je penche la tête pour regarder en face de moi et j’aperçois l’arrêt de bus. Je vois également que la voiture du frère de mon amie est là. “Super, je vais encore revoir l’abruti de service”  Le chauffeur s’arrête et tout le monde se lève sauf moi, car je veux dire un dernier truc à Tricia. -       Éléonore, ça ne va pas ? -       Je vais très bien. Je voulais simplement te dire de ne pas être triste pour moi, car maintenant, je sais comment mon père peut se comporter et j’ai appris à faire avec. Et puis je désirais te donner ça. Je lui tends un bout de papier. -       C’est mon numéro de téléphone. Tu peux m’appeler quand tu veux. Le sourire de Tricia réapparaît sur son visage. Elle me serre dans ses bras, ce qui scelle notre amitié. -       Je t’appelle ce soir, me dit-elle en se levant. On avance pour descendre du bus et ce cher Steven est là. Une nouvelle fois, je ressens cette chose bizarre. Je n’arrive pas à décrire exactement ce que j’ai. C’est assez étrange comme sensation et en même temps, c’est très agréable. J’ai l’impression qu’à l’intérieur de moi des papillons volent dans tous les sens. -       Ton cher frangin est là. -       Ouais, je vois, laisse-moi parler. Je vais vous présenter, répond Tricia avec un petit sourire. J’observe mon amie descendre et sauter dans les bras de son frère. “J’aimerais trop avoir une relation ainsi avec un membre de ma famille, mais cela reste et restera impossible à réaliser.” -       Coucou Steven. C’était génial le lycée et puis je me suis fait une superbe copine, dit Tricia en me montrant du doigt. -       Super ma puce, c’est géant ça. Je vois les yeux du jeune homme se poser sur moi. L’attitude joyeuse, qu’il a eue en voyant sa sœur, change immédiatement. Il me dévisage de bas en haut et me snob royalement. Il détourne son regard et fixe sa petite soeur. Je vois un magnifique sourire se former sur son visage. -       Steven, voici Éléonore. Éléonore, voici Steven mon grand frère. Pour montrer que je ne suis pas non plus qu’une sauvage et qu’une grossière personne, je lui tends la main et lui dis. -       Bonsoir Monsieur. -       Bonsoir Mademoiselle. À ce que je vois, on ne dit plus de vulgarité. “Qu’est-ce qu’il a cet abruti ! Il me cherche ou quoi ? Reste calme Éléonore. Non, je ne peux pas…” -       Non pas encore, mais si vous voulez je peux dire bonsoir Monsieur c*****d. J’aperçois ma copine derrière son frère, qui rigole dans sa barbe. Et puis, j’observe Steven faire une tête “non, mais pour qui elle se prendre celle-là”. J’avoue que je suis assez contente de ma petite phrase. -        Tricia, je te dis à demain passe une bonne soirée. Bonne soirée Monsieur Steven. Je pars en direction de mon vélo. J’entends ma copine me souhaiter une bonne soirée. Je me retourne pour lui faire un dernier geste, je la vois me dire avec ses mains qu’elle m’appellera plus tard. Je détache mon vélo, pose sur ma tête mon casque, enfourche ma bécane rose et pars de cet arrêt de bus.
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