Chapitre 25

1490 Words
L'assemblée resta silencieuse, attentive. Il poursuivit : - J'aime aussi son style. C'est vrai, c'est osé... mais elle sait porter ses vêtements. Elle a une allure. Une vraie prestance. Elle sait marcher dans une pièce et capter l'attention. Un souffle passa dans la pièce. Tout le monde attendait la suite. Mourad marqua une pause. Zaynab, un rictus aux lèvres, lâcha tout haut, nonchalamment : - Bon, vas-y. Dis le "mais", comme avec les deux autres. Un frisson parcourut l'assistance. La mère de Zaynab ferma brièvement les yeux, excédée. Jennah, elle, souffla à Lina : - Elle aussi, c'est fini. Mourad resta quelques secondes sans rien dire, la fixant droit dans les yeux. Puis il répondit simplement : - Évidemment qu'il y a un mais. Il laissa planer un silence pesant, puis ajouta, d'un ton plus ferme : - Zaynab a un comportement de bébé gâtée. Et c'est exactement le genre de tempérament que je ne supporte pas. Zaynab redressa la tête, choquée, et rétorqua sèchement : - Ah ouais ? Les murmures reprirent, plus insistants. Les regards se tournaient tantôt vers elle, tantôt vers Mourad. Ce dernier resta de marbre. Il tourna lentement les talons pour rejoindre son siège. Mais avant même qu'il ne s'installe, Zaynab lança : - C'est tout ? Il se retourna, la fixa longuement, puis répondit froidement : - C'est tout. Et il s'assit. Un silence gêné s'installa. Mara, la mère de Mourad, souffla à sa fille Bella, exaspérée : - Qu'elle se taise maintenant... L'oncle de Mourad prit la parole, rompant le silence tendu. - Nous avons entendu Mourad. À présent, nous allons écouter l'avis de Bella Dior. Tous les regards se tournèrent vers elle. Bella Dior s'avança légèrement, droite, confiante. Son ton fut clair dès le départ. - Je vais être brève. Je ne vais pas inventer toute une histoire pour chaque prétendante. Elle balaya la salle du regard, puis poursuivit calmement. - Mon coup de cœur, c'est Zaynab. Un souffle de choc traversa la pièce. Les visages des prétendantes se figèrent. Personne ne s'y attendait. Personne... sauf Zaynab, qui, fidèle à elle-même, resta impassible. - Zaynab est franche. Sincère. Elle vient encore de le prouver devant tout le monde. Contrairement aux autres, elle ne joue pas un rôle pour plaire. Les autres ont fait ce qu'il fallait pour séduire Mourad à tout prix. Et c'est justement ce que je trouve dangereux. Ce n'est pas sincère. Une femme capable de tout pour avoir un homme peut être capable de tout pour d'autres raisons, ensuite. Jennah lança un regard noir à Bella Dior, qui l'ignora royalement. - Zaynab a un comportement très différent de celui de Mourad. Et c'est exactement pour ça que je pense qu'ils peuvent se compléter. Il a besoin d'une femme qui ne se laisse pas faire. Une femme qui a du caractère, qui peut l'adoucir. Pas d'une femme influençable et docile, qui va tout accepter, même ce qui est mauvais pour lui. Ce genre de femme n'apporte aucun changement réel. Elle suit. Elle ne construit rien. Mara, qui jusque-là s'était retenue, interrompit sa fille sèchement. - Ça suffit, Bella Dior. Tu ne sais pas ce dont ton frère a besoin. Son ton était tranchant. Elle n'aimait pas ce qu'elle venait d'entendre. Parce qu'elle savait que les mots de Bella Dior pouvaient avoir du poids. Trop de poids. Elle était sa préférée. Mourad n'écoutait que très peu de personnes, mais Bella Dior faisait partie des rares à avoir une réelle influence sur lui. L'oncle, lui, hocha lentement la tête. Il appréciait le discours de Bella Dior. C'était franc, net, réfléchi. Mourad, de son côté, regardait sa sœur avec fierté. Elle venait de mettre des mots sur des ressentis qu'il n'avait lui-même pas encore formulés. Oui, elle le connaissait. Et oui, elle savait ce qu'il lui fallait. Enfin, Samer, l'oncle de Mourad, se leva et déclara calmement : - C'est terminé. Nous avons tout entendu. Mais à peine eut-il terminé que Mara, la mère de Mourad, se leva à son tour et s'approcha de lui. Elle se pencha pour lui murmurer quelques mots à l'oreille. L'assemblée retint son souffle. Samer hocha lentement la tête, puis reprit la parole : - La cérémonie de l'élue n'aura pas lieu demain. Nous devons prendre le temps d'analyser ce qui a été dit, et ce que nous avons vu. Un murmure de surprise s'éleva dans la salle. Les visages se tournaient les uns vers les autres, confus. Mais Jennah et Lina, elles, se retinrent à peine de sourire. Un délai, c'était une opportunité de se rattraper. Zaynab, elle, se leva sans attendre. - Quand est-ce qu'elle aura lieu alors ? Et pouvons-nous rentrer chez nous entre-temps ? Samer répondit posément : - La cérémonie se tiendra dans trois jours. Jusque-là, vous resterez ici. Nous voulons encore vous observer. Un silence de plomb tomba. L'information choquait, déroutait. Sauf quelques rares personnes, tout le monde fut pris de court. Zaynab fronça les sourcils. - Je ne peux pas rester dans cette maison plus longtemps. Cette cérémonie devait avoir lieu demain. Elle doit se faire. Mara, offusquée, se redressa vivement. - Comment peux-tu prendre la parole ainsi devant tes aînés ? Et contester une décision devant tout le monde ? Zaynab, visiblement agacée, mais gardant un ton mesuré, répondit : - Je suis désolée, Oum Mourad. Un silence. Mara la fixa longuement, avant de dire d'un ton tranchant : - Cette fille ne peut pas être choisie. Elle n'aimera jamais Mourad. Et elle n'aimera même pas cette famille. Zaynab répliqua, sereinement : - C'est vrai. L'assemblée fut saisie. Certains étouffèrent une exclamation. - Je n'aimerai peut-être pas Mourad. Et sûrement pas certaines personnes de cette maison. Mais j'aime beaucoup Bella Dior. Elle est gentille et sincère. Sa mère, sidérée, lui lança : - Tais-toi ! Mais c'était trop tard. Mara, hors d'elle, tourna son visage vers Samer. - Vous avez tous entendu ! Cette fille doit être disqualifiée immédiatement ! Samer leva la main calmement. - Calme-toi, Mara. La mère de Zaynab, furieuse, s'adressa à sa fille : - Excuse-toi, maintenant ! Zaynab, agacée mais obéissante, s'inclina légèrement vers Mara. - Je m'excuse, Oum Mourad. Mara la fixa d'un air glacial. - Tu m'appelles Oum Mourad. Les autres m'appellent Khalti. Ici, tout le monde m'appelle Mama. Tu le sais très bien. Elle ajouta avec mépris : - Tu montres clairement que je suis la mère de Mourad, mais que tu ne me considéreras jamais comme ta propre mère. Zaynab esquissa un sourire nerveux. De nouveau, la salle fut traversée d'un frisson. Ce sourire détonnait. - Qu'est-ce qui te fait rire ? demanda Mara, les yeux plissés. Zaynab la regarda sans ciller. – Je suis désolée… Je vais t’appeler maman. Puis, avec un ton teinté d’ironie maîtrisée, elle ajouta : – Tu es contente, maman ? Un silence pesant tomba dans la pièce. Les regards passaient de l’une à l’autre. Et le visage de Mara, figé, trahissait une colère sourde. Mara la regarda avec un regard noir, glacé. Elle n'avait jamais été défiée de cette façon. Cette fille avait un caractère. Trop. Et c'était insupportable. Ce fut à cet instant que Mara comprit qu'elle ne pourrait jamais accepter Zaynab. Parce qu'en vérité... elle voyait en elle un miroir. Et elle détestait ce qu'elle voyait. Oulaya, qui fulminait depuis un moment, éclata soudain : – Tais-toi, Zaynab. Arrête de parler ainsi à notre mère. Ne dis plus rien. Saran enchaîna aussitôt, la voix dure : – Cette fille ne doit pas être choisie. Je le dis clairement : je souhaite qu’elle ne le soit jamais. Jamais. Zaynab, imperturbable, esquissa un sourire et répondit calmement : – Moi, j’aime bien Saran. Et j’espère que ton souhait s’exaucera. Un silence glacé s’abattit dans la pièce. L’assemblée était pétrifiée. Zaynab venait de retourner la salle d’un simple trait d’esprit. Elle venait de marquer les esprits. Mara bondit de son siège. – Assez. Zaynab, sors de chez moi. Zaynab, radieuse comme si on venait de lui accorder ce qu’elle désirait depuis longtemps, répliqua avec un faux air reconnaissant : – Merci… maman. C’est la dernière fois que je te le dirai, puisque nous ne nous reverrons plus. Mourad se leva brusquement. Il s’avança au centre de la pièce, sa voix coupa l’atmosphère comme une lame. – Ça suffit. Zaynab ne va nulle part. Les choses se passeront comme le veut la tradition. Les prétendantes, sortez. C’est terminé. Mais Zaynab refusa de bouger. – Je veux rentrer chez moi. Mourad s’approcha lentement d’elle, planta son regard dans le sien et lui lança d’un ton autoritaire : – Ferme-la. Et dégage. Zaynab ne baissa pas les yeux, elle resta droite, fière. Alors il se pencha, tout près de son oreille, et chuchota entre ses dents : – Tu veux vraiment que je m’énerve ici ? Devant ta mère ? Le regard de Zaynab glissa vers sa mère, posée dans un coin, puis elle ravala sa colère. A suivre
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