Chap. 6
La célébration avait bien débutée, la vedette de cette première journée, c’était le maire. Il avait vu les choses en grand pour l’ouverture, l’inauguration de la nouvelle bibliothèque municipale avait été le clou de ce moment grandiose. Elle allait être le site préféré de toutes les personnes avide d’en savoir un peu sur l’histoire de la ville et du royaume. Le maire avait rassemblé toute une collection d’archives historiques et de romans en tout genre. Une perle ! C’était un sacré coup de pub pour l’homme, surtout à quelques mois des élections municipales.
Ce qui en soit n’était pas une mauvaise chose, car chacun des maires qui s’étaient succédé à la tête de la ville, lui avait apporté quelque chose qui en faisait un endroit spécial. Et au fil des années, cette petite ville était devenue ce petit coin de paradis, où les gens venaient chercher une meilleure qualité de vie. Plus de sécurité pour eux et leur famille, et des opportunités de pouvoir innover dans un domaine ou un autre. La ville avait des allures de princesse indou, parée de ses plus beaux atours, c’était du grand art. Les rues étaient lumineuses même la nuit, surtout… la nuit.
Oboun et le petit nouveau étaient les premiers à assurer la permanence, pendant les deux jours après le jour de l’ouverture. Et ces deux jours allaient être, non seulement éprouvants pour l’homme mais aussi très révélateurs. Comme tous les matins, Oboun se leva aux aurores et se fit un petit déjeuner copieux, il avait déjà prévu qu’il y avait des chances pour qu’il n’ait pas le temps de déjeuner. Oloun était déjà debout elle aussi, et préparait tout ce dont elle avait besoin pour son stand. Malheureusement pour le père et la fille, la confiance n’était pas rétablie. L’homme alla donc au garage sans prendre e nouvelle de sa fille ni du stand qu’elle préparait. Il savait toutefois que le chérif passerait jouer les chauffeurs pour la gamine, et lui donnerait un coup de main pour la mise en place.
En arrivant au garage il trouva le nouveau assis sur l’une des autos sur lesquelles il avait bossé la semaine précédente et que le propriétaire n’avait pas encore récupéré, et pour cause, la pauvre avait eu un accident et était encore à l’hôpital. Le nouveau avait quelque chose de différent des autres jeunes qui venaient bosser au garage pendant les stages imposés par leurs centres de formation. Alors que les autres arrivaient pensant tout savoir et vous donnaient même des leçons, lui se plaisait à observer les anciens travailler. En voyant Oboun arriver il descendit de la voiture et alla à sa rencontre :
_ Bonjour Monsieur ! Lança-t-il en souriant à l’homme
_ Bonjour, alors dis-moi c’est quoi ton nom déjà ? S’enquit Oboun après lui avoir serré la main
_ Ho appelez-moi Okoss, c’est comme ça que mes amis m’appellent
_ Et pourquoi ? Si ce n’est pas indiscret,
_ En fait en première année, pendant le cours de méca, j’ai fait un truc stupide et je suis passé par la fenêtre et depuis les autres mon surnommés l’éclair, c’est triste mais j’aime bien ce surnom malgré ce qu’il représente dans leur esprit
_ Tu as bien raison, un éclair et tout à la fois insaisissable et impressionnant, il ne tient qu’à toi de lui faire avoir la signification que tu veux, lui rétorqua l’homme
_ Merci monsieur, on est supposé faire quoi ?
_ C’est jour de fête alors on ne bosse pas sur les autos des clients du garage, on se concentre sur le fait d’apporter une assistance tactique aux pompiers en cas d’accident grave ou dans lesquels ils pourraient avoir du mal à sortir les accidentés de leurs autos, tu vois le truc ? Interrogea Oboun en fixant Okoss
_ Je vois, ok, alors on doit juste se tenir prêt ?
_ C’est ça, répondit l’homme en souriant
Ils n’étaient pas là tous les deux depuis un moment qu’Oboun cru voir quelque chose scintiller en regardant en direction de l’une des autos connectées sur lesquelles le nouveau était supposé travailler :
_ Qu’est-ce que tu as mis sur cette auto ? Dit-il en s’en approchant
_ Moi ? Rien du tout, qu’est-ce tu vois, je pensais que tu ne bossais que sur des anciens modèles
_ Normalement, mais… soulève le capot pour voir,
_ Oui une minute, fit Okoss en ouvrant la voiture et actionnant la manette qui contrôlait l’ouverture du capot sous lequel se trouvait le moteur de la voiture
_ Prends-moi une torche là-bas,
Le jeune homme s’exécuta sans vraiment comprendre ou l’ancien voulait en venir. Il observa Oboun pendant que l’homme traquait quelque chose dans le moteur du bolide. Pendant une bonne dizaine de minutes Oboun resta la tête dans le moteur en silence puis il se redressa en montrant un boitier au jeune Okoss, qui attendait toujours une explication :
_ C’est supposé être là ça ? Fit Oboun en donnant le boitier au petit
_ Attends que je regarde,
La gamin sortit ses tournevis et entreprit d’ouvrir l’objet, il dû s’y essayer encore et encore avant d’en arriver à bout. Ensuite, il vérifia méticuleusement les différents circuits qui composaient l’objet et comprit assez vite que ce truc n’avait rien à faire dans cette voiture. C’était un boitier qui servait à parasiter la connexion de l’auto et à la diriger vers un autre centre de contrôle à distance. Comme si cette auto avait volontairement été rendu « piratable ». C’est ce qu’il donna à Oboun comme diagnostic :
_ Je comprends mieux pourquoi je n’arrivais pas à la réparer, à chaque fois que je terminais le contrôle, je la réinitialisais et d’un coup les mêmes anomalies que j’avais traitées revenaient comme par magie,
_ Tu crois que c’est l’œuvre d’une personne qui a voulue faire du tort au proprio de cette auto ?
_ Si c’est le cas il y a mis les moyens, ce n’est pas du toc ce truc, il y a quelque part une équipe de types pas du tout stupides qui ont passés des heures à bosser pour pondre ça
_ C’est si pointu comme technologie ?
_ Ouai, fit le nouveau en rendant le boitier à l’homme qui le refusa
_ Tu devrais remettre ça au patron, il saura quoi en faire
_ Comment tu as su que c’était là dis-moi ?
_ Je n’en sais absolument rien, j’ai vu comme une lueur qui sortait du moteur, j’ai d’abord pensé à un autocollant luminescent
_ J’aurais préféré que ce soit ça, fit le jeune
_ Moi aussi
Okoss regarda Oboun un peu soupçonneux, il se demandait comment on pouvait même voir un autocollant lumineux sur un moteur dont le capo était rabattu ? C’était bizarre ! il y avait dans le garage, depuis quelques jours, une auto connectée qui était arrivée escortée par des agents de police. Ils avaient dit au patron qu’elle avait été impliquée dans un grave accident de la route mais qu’il n’y avait personne au volant. Le patron avait accepté cette auto mais ne se faisait pas trop d’illusion sur ce qu’ils allaient trouver. Il se dit que certainement, comme pour les anciens modèles, le proprio avait dû oublier de serrer le frein à main, une malheureuse négligence.
Mais comme avec la voiture du gamin, Oboun passa près de l’auto et fut pris d’un genre de vertige, et dès qu’il posa les yeux sur le véhicule, il eut la même vision que la première fois. Quelque chose de lumineux clignotait dans le moteur. La voiture n’avait pas encore été attribuée à un mécano, il pouvait donc y jeter un œil sans marcher sur les plates-b****s de qui que ce soit. Il savait cependant que l’explication qu’il avait servi au jeune quoique vraie, ne suffirait pas au patron.
Encore une fois Okoss dû se contenter de le regarder faire en espérant que cette fois il ne trouve rien. Mais il ne fut pas exaucé. En sortant la tête du moteur l’homme tenait dans sa main un autre boitier à peu de chose près semblable au premier. Okoss décida de l’ouvrir lui aussi et cette fois il se mit à trembler de tout son corps :
_ Mince monsieur, celui-ci est encore plus performant que l’autre, co… comment vous faites ça ?
_ Je n’en sais rien mais je pense que tu devrais appeler les secours
_ Pourquoi vous pensez que nous sommes en danger ?
_ Non mais je vais tourner de l’œil dans un moment…
Il n’eut pas le loisir de terminer sa phrase qu’il était allongé de tout son long sur le sol du garage avec un Okoss paniqué à ses côtés. Le jeune homme appela le chérif et tenta de lui expliquer que l’ancien avait fait un malaise et raccrocha. Il alla tirer le canapé qui se trouvait dans le bureau de la secrétaire et allongea l’homme dessus. Il venait à peine de l’y installer lorsque les secours arrivèrent, suivit du chérif. Okoss alla à la rencontre de l’homme et l’invita à discuter à l’écart, ce que le chérif prit pour une lubie d’ado, jusqu’à ce qu’il lui relate les évènements qui avaient précédés l’évanouissement d’Oboun.
Le chérif connaissait le mécano depuis assez longtemps pour savoir qu’il n’était pas un pirate informatique ou un féru de nouvelle technologie. Il se dit qu’il y avait certainement une explication à tout ceci, et invita le jeune à garder le silence sur ce qui s’était passé, Oboun n’était pas n’importe qui dans la petite ville, et certains attendaient dans l’ombre qu’il fasse un faux pas, surtout depuis les dispositions que l’ancien de leur clan avait pris dans son testament concernant sa fille. Il ne manquerait plus qu’on le taxe de t********e, même sans preuve cela ferait désordre, et la rumeur se chargerait de rendre ça plus vrai que vrai.
Sur le chemin de l’hôpital, le chérif repensait à l’histoire somme toute délirante que lui avait raconté le gamin. Il se demandait ce qui pouvait bien être à l’origine de ce don, ou capacité que l’homme développait avec les autos connectées. Il avait appris par le doc qu’il avait eu l’année d’avant quelques soucis avec les ondes que toutes ces autos répandaient et dans l’air et encore plus au garage. Mais le doc lui avait confirmé que tout allait bien grâce à un traitement qu’il lui avait prescrit. Alors quoi ! Il se faisait du souci maintenant, et si une tumeur au cerveau était à l’origine de cette aptitude un peu hors du commun ?
Il décida d’en parler avec le doc une fois à l’hosto, et peut-être en saurait-il plus une fois qu’on aurait fait quelques analyses à l’homme. De la patience, c’était ce qu’il lui fallait avoir désormais. Mais pendant qu’il s’efforçait à être optimiste il arriva quelque chose de bizarre, une fois l’ambulance devant l’hôpital, Oboun en descendit comme si de rien n’était. Et ce grand gaillard n’étant pas très friand des séjours à l’hôpital, faillit lui glisser entre les doigts, en disant qu’il allait beaucoup mieux et que tout ça, devait juste être un coup de fatigue :
_ Bien sûr que c’est un coup de fatigue, lui répondit le chérif, mais tu n’en as jamais eu à 10h du matin, tu ne veux pas savoir ce qui a causé cette fatigue soudaine ?
_ Chérif !!!
_ Ecoute là en l’occurrence je ne pense pas seulement à toi, tu sais que la petite elle n’a que toi, fait ça pour elle, juste des analyses et tu pourras retourner au garage, assura le chérif
Oboun se passa la main dans les cheveux et accepta un peu malgré lui. Avec toutefois un brin de curiosité dans le cœur. Le doc lui fit une prise de sang, un test d’effort, un électro-cardiogramme et après ça, lui conseilla amicalement de prendre son après-midi :
_ Le gamin c’est un nouveau, je ne peux pas le laisser seul au garage…
_ D’accord, fit le doc, mais essaie de ne plus te fatiguer, et puis il y a des téléphones appelles ton patron et expliques lui
_ Ok, je vais faire ça, mais hé chérif pas un mot de tout ça à Oloun avant qu’on ait les résultats des analyses
_ C’est mieux en effet, reconnu le chérif
Il se proposa de ramener l’homme au garage et en profita pour lui relater ce que lui avait raconté le gamin sur leur étrange matinée. Oboun ne nia pas et lui confia que tout ça l’inquiétait un peu. Il ne savait pas comment il allait expliquer ça au patron :
_ Ce n’est pas ton patron qui m’inquiète moi, fit le chérif
_ Ah non ?
_ Non, ça fait un moment qu’on se connait tous les deux, et tu peux ne pas me croire mais je tiens à toi vieille branche, et pas seulement parce que tu te charges de la maintenance des voitures de la police, l’homme rit fort en disant ça
Oboun rit lui aussi, il savait bien que le chérif ne venait plus le voir chez lui, que pour avoir des nouvelles de la gamine, et ça depuis un bail. Cela le fit penser à la vieille dame, elle aussi tenait énormément à lui. Il ne pouvait pas simplement prendre ce qui se passait comme quelque chose qui ne concernait que lui, mais en même temps il n’était pas très chaud pour se comporter comme si sa vie était forcément en danger. Il aviserait lorsqu’il aurait les résultats des analyses que lui avait faites le doc. Et d’ici là, sa vie resterait le long fleuve tranquille qu’elle avait toujours été.
Du moins c’est qu’il avait prévu. Mais bien souvent, lorsque les gens qui sont proches de vous apprennent que vous avez eu un souci si petit soit-il, hé bien ils en font souvent trop. Et Elik était une petite ville, dans laquelle les nouvelles avaient tendance à circuler un peu trop vite au goût de certains. A partir du lendemain, madame Elone pris l’habitude de passer le voir en sortant de son travail. Elle disait qu’elle voulait veiller sur lui de plus près dorénavant. Cela amusa l’homme, sans le déranger outre mesure. La vieille Nkoghe quant à elle, se mit à lui faire des pâtisseries régulièrement. Il n’avait plus besoin de se faire à manger le matin, il lui suffisait de se faire une tasse de lait, et de sortir soit des croissants, soit des gâteaux du frigo. La vie de château.
Si tout ça n’avait pas été une preuve d’inquiétude de ses amis, il aurait pût s’y faire. Mais à chaque fois qu’il les regardait il voyait de l’inquiétude dans leur yeux et il n’aimait pas ça, il priait désormais pour que les résultats de toutes ces analyses arrivent vite pour mettre fin à tout ça. il ne fallait surtout pas que sa vie devienne comme celle de tous ces gens qui vivaient de la pitié des autres. ils profitaient du fait que leurs amis et leurs familles, se fassent du souci pour eux pour obtenir d'eux des services que bien souvent on ne leur aurait pas rendu s'il n'y avait pas eut cette situation "handicapante" dans leur vie. Et lui trouvait cela bien triste. alors ces résultats seraient une délivrance, et aussi un soulagement parce qu'il avait l'impression qu'Oloun savait. Elle ne disait rien, mais son comportement avait étrangement évolué depuis qu'il était revenus de l'hopital. Ce n'était pas forcément le chérif qui avait vendu la mèche, mais il aurait préféré qu'elle ignore tout ça au moins jusqu'au jour où il allait revoir le doc.
Ces choses-là prenaient du temps et lui qui en temps normal était quelqu'un de plutôt patient, découvrait qu'il pouvait manquer lui aussi de patience dans certaines circonstances et cela l'amusa, malgré la situation un tantinet stressante qu'il vivait. mais bon, même si les choses n'allaient pas à la vitesse qu'il voulait, il avait au moins eut grâce à ce malaise le privilège d'assister à la fête, et non plus simplement de l'encadrer, il put donc visiter le stand de sa gamine.