Victor rentre de ses vacances aujourd'hui. Je suis pressé de le voir, d'avoir des réponses. Je ne parle plus à Max depuis notre dispute, il ne fera rien pour m'empêcher de parler à mon ami. Anna viendra avec moi, comme ça elle saura, elle aussi. Je me réveille dans le canapé du salon de mon amie. Tout le monde est déjà éveillé, à priori. J'entends leurs voix venant de la cuisine. Je me lève doucement et ne prends pas la peine de me changer. Je vais directement à la cuisine petit-déjeuner.
– Bonjour, Mike, me salue la mère d'Anna avec un léger sourire.
– Bonjour, je réponds.
Elle me sert des œufs brouillés avec du bacon tandis que je m'installe à table, à côté d'Anna. Son père lit un journal tout en buvant une tasse de café. Il me lance un simple regard pour me saluer et poursuit sa lecture. Anna a déjà fini son petit-déjeuner mais m'attend.
– C'est bien aujourd'hui, que Victor revient ? demande sa mère.
Je me contente de hocher la tête, soucieux. J'ai décidé d'ignorer ce que m'a raconté Max, l'autre fois. Victor a fini par répondre à mon message pour me dire qu'on se verra devant le portail, ce matin. Il a ajouté : « Viens à l'avance. ». Anna prend cette enquête au sérieux, telle une inspectrice des séries policières, mais elle n'a réussi qu'à trouver des hypothèses glauques telles que : « Monsieur Clark a en fait fait toute cette mise en scène et enfermé tes parents dans sa cave ! », ou encore : « Peut-être que c'est un complot entre Max et Monsieur Clark, et que tu étais présent le soir du crime mais par je-ne-sais-quel-moyen tu as perdu la mémoire ! Peut-être que tu étais bourré, sinon... ».
Enfin bref, je trouve toutes ses hypothèses absurdes. Je termine mon petit-déjeuner avant de suivre Anna dans la salle de bains où nous nous brossons les dents. Il se trouve que j'ai appuyé trop fort sur le tube de dentifrice et en ai mis de partout sur le lavabo. J'ai bien crû qu'Anna allait me tuer.
Après cela, je me change et me coiffe, puis nous partons, direction le lycée. Le chemin pour aller au lycée est plus long que depuis la maison de mon meilleur ami, mais on peut tout de même y accéder à pieds.
Pendant tout le trajet, mon amie me parle de Julia, qui a commencé à traîner avec d'autres filles qui sont de véritables pestes et qui s'amusent à critiquer et espionner Anna et moi-même dans la cour du lycée. En somme, je me permets également de l'insulter bien que ce ne soit pas la meilleure des solutions. Nous finissons par arriver devant le lycée où Victor, Max et Monsieur Clark nous attendent. Je ne sais pas ce que ce dernier fait ici. Nous nous approchons tous deux, et Victor jauge Anna du regard.
– Tu es sûr que tu veux qu'elle reste ? me demande-t-il.
– Oui pourquoi ? Elle a le droit de savoir, non ? je réponds.
– Si tu veux...
– Bon alors, parlons de cette soirée. Victor, on te laisse raconter de ton point de vue, lâche Max.
– Oui. Ce que tu ne sais pas, Anna, c'est que Mike est atteint d'un dédoublement de la personnalité. Il va certainement nier comme il ne se souvient de rien.
Je ne le contredis pas. J'irai faire des examens, et puis je verrai bien. Tous se tournent vers Anna pour voir sa réaction.
– Et bien quoi, me regardez pas comme ça ! Continuez votre histoire.
Je suis à la fois soulagé et surpris de sa réaction.
– D'accord. Ce que tu ne sais pas aussi, c'est que les parents de Mike n'en avaient rien à faire, de lui...c'était même pire que ça. La deuxième personnalité de Mike, c'est Jordan. Il y a eu plusieurs fois où Jordan nous a parlés, lorsque Mike oubliait de prendre ses médicaments, mais au cours des années il devenait très...spécial, d'après Mike, il est devenu haineux envers tout le monde, et très v*****t.
– Comment ça, c'était même pire que ça ? je demande.
– Mike, j'aurais aimé ne jamais avoir à te le dire comme ça parce que tu penses que tes parents t'aimaient et que vous étiez toujours soudés, mais en vérité, tu étais maltraité, tu étais battu par ton père. On a fini par le découvrir avec Max il y a deux ans, et c'est là que tu nous a tout raconté et expliqué. Tu volais de l'argent à ton père pour acheter tes médicaments, tu as toujours détesté Jordan parce qu'il fait de toi une personne anormale.
Je suis surpris d'encaisser ça d'un coup, là, mais je le crois. C'est la vérité, je dois l'accepter telle quelle.
– Avec Max, on n'en pouvait plus de te voir triste, tu étais vraiment désespéré, ton seul espoir, c'était Anna parce qu'elle ne savait rien et te voyait comme une personne normale. Quand on te voyait tous les jours avec de nouveaux bleus, des égratignures, c'était insupportable ! On avait une telle haine contre tes parents...et toi aussi, d'ailleurs. On est allé parler à Monsieur Clark pour demander son aide. Il nous a dit d'appeler les services sociaux, et a prévenu tes voisins boulangers. À partir de ce jour, on a appelé chaque jour les services sociaux, mais ils ne répondaient jamais. On a décidé de tout faire pour te vider l'esprit, alors on a organisé une fête. Anna n'a pas pu venir, malheureusement. Tu étais partant pour venir, mais ce soir-là, tu n'es jamais venu.
Ces derniers mots résonnent dans ma tête. Ma vision commence à se brouiller. Anna me lance un regard inquiet. Je commence à voir tout noir, puis je me sens tomber en arrière. Je n'entends plus rien. Je commence à avoir des acouphènes. Je divague vers l'inconscience, puis plus rien.