ALEXYA
— Messieurs, si vous n'avez plus rien à ajouter, nous avons terminé.
Mademoiselle Rozatti, nous sommes ravis que contrairement à votre frère, vous preniez à cœur nos suggestions.
J'observe avec attention celui qui a prononcé cette phrase. Un homme assez mûr, au crâne rasé avec une grosse bedaine. Stefano contrairement à moi peut se révéler très impatient, c'est pourquoi son conseil d'administration le craint autant. Je hoche la tête et mon regard se pose sur le siège vide à ma gauche. Mon agacement monte d'un cran. Cet idiot d'investisseur, ne s'est pas présenté à la réunion dont nous avions convié la date il y a deux semaines, par l'intermédiaire de nos secrétaires respectives.
S'il pense que nous pouvons nous passé de son aide alors soit. Mais la moindre des choses est de prévenir quand on a l’intention de manquer une réunion aussi importante. Ça nous aurait évité de l'attendre et de commencer aussi tardivement. Je regarde mon poignet, et je constate qu’il est presque 20 heures.
Je mets fin aux murmures qui s'élèvent dans la pièce, en me levant, les deux mains à plat sur la table ovale de réunion. Ils se taisent tous pour m'observer. Bien, j'ai leur attention.
— Je vous souhaite de passer une bonne soirée. En ce qui concerne l’investisseur externe qui devait nous apporter son expertise…commence l’un des membres du conseil.
— Il a brillé par son absence. Je me chargerai d’en trouver un autre. Je vous recontacterai pour une nouvelle réunion dans quelques jours.
Ils acquiescent tous et je sors de la pièce, sans plus tarder. Je me rends dans mon bureau, qui est à proprement parlé celui de mon frère. Mais comme j'occupe son poste en attendant sa venue, je m'y suis installée.
À travers la baie vitrée, j'observe la ville, du haut du quinzième étage. Paris, la ville des amoureux, est vraiment animée les soirs. Parfois l'envie de me mêler à la foule et d'avoir un instant d'insouciance me saisit. Mais je ne peux pas. Beaucoup de responsabilités reposent sur mes frêles épaules.
Mon frère compte sur moi. Et je dois lui prouver mon efficacité. D'ailleurs, demain, quand je verrai l'investisseur je lui ferai passer un sale quart d’heure.
Toc toc toc...
— Entrez.
— Signora Rozatti, votre chauffeur est là.
Ma secrétaire débite, sa phrase en retenant son souffle.
— Quel est votre nom déjà ?
— Célia Cruget.
— Célia, vous pouvez rentrer. Dites à Mir... Mon chauffeur de m'attendre en bas.
Je préfère garder l'identité de mes hommes secrète. Au sein de cet immeuble je ne suis qu'une femme d'affaires. Pas celle qui va bientôt prendre les rênes d'une organisation mafieuse. Il faut protéger son image.
Elle ne bouge toujours pas. Que n'a-t-elle pas compris de ce que je lui ai dit?
— Vous attendez quelque chose?
— Euh... Mr KURKOVICH est également là.
— Qui?
— L'investisseur que nous avons attendu pour la réunion d'aujourd'hui.
— Dites-lui que la réunion est terminée. Nous n’avons plus besoin de ses services et surtout, qu’il ne revienne plus.
— Il attend, pour discuter avec vous.
— Dites-moi, pour qui travaillez-vous Célia ?
— Pour vous Signora ROZATTI.
— Bene.
Elle sort précipitamment et je me retourne encore vers la baie vitrée, les bras croisés. Je voudrais bien avoir une discussion avec cet investisseur, mais pas aujourd'hui. Je ne suis pas disposé à fonctionner selon son bon vouloir. Il devait venir à une certaine heure, chose qu'il n'a pas faite. Il ne me verra donc plus aujourd'hui.
Il faut qu'il comprenne que celle avec qui il va devoir travailler est dotée d'une certaine rigueur. Plus d’une demi-heure plus tard, je sors de ma contemplation. Il faut que je rentre. Je m’empare de mon sac et je sors du bureau. Je fais une halte dans celui de Célia. Il est vide. Combien de temps ai-je réellement passé devant les lumières de Paris?
Je n'en sais trop rien. Je me dirige vers la cabine de l'ascenseur en faisant claquer mes talons vertigineux sur le carrelage blanc.
Tout est si calme, que j'envie presque l'immeuble. J'aimerais avoir une sorte de paix intérieure, à un moment donné de ma vie. Mais je crois que c'est impossible. Pas tant que je m'appelle Alexya Rozatti. Je repense à mon frère, qui a enfin trouvé le bonheur avec Zara.
Tout le monde en est surpris, moi la première. Cette union relève du miracle. Pourvu que leur bonheur dure. Ce monde m'est inconnu. L'amour, les déclarations d'amour... Les cœurs etc. C'est un univers trop chimérique pour moi.
Je n'ai jamais voulu d'une relation pareille, et jusque-là personne ne m'en a jamais proposé.
Tu n'as jamais laissé quelqu'un le faire.
Pas que je me plaigne. Qui pourrait me supporter? Et qui pourrait rester avec moi, en sachant ce que je sais? J'ai toujours considérer les hommes comme un moyen de me faire plaisir. Des objets sexuels. Je décide de quand, où comment, et avec qui. Sans oublier qu'au lit, c'est moi qui domine.
Après quoi, basta ! Je n'ai jamais couché avec le même homme deux fois. Jamais.
Pourquoi le ferais-je? Ce serait lui donner des espoirs là où il n'y en a pas. Je suis imperméable aux critiques des autres, et puis... Qui peut se permettre de me donner son avis sur la manière dont je gère ma vie sexuelle?
Enfin, je suis devant la cabine. J’appuie sur le bouton d'appel et je patiente. Elle s'ouvre quelques minutes plus tard, j'y entre, je presse le bouton adéquat pour aller au parking et je m'accote contre sa paroi en métal. Je sors mon téléphone qui ne me quitte jamais et je commence à pianoter le clavier.
Je me demande comment faisaient les gens dans le passé sans ce machin électronique. Oh... 10% de batterie. Dio! Il faut que je rejoigne vite Mirko. Je lui demande par sms, de se garer juste à la sortie, car je ne veux pas avoir à trop attendre où à marcher.
L'icône de ma messagerie clignote et je m'empresse d’ouvrir le nouveau message. Zara! Elle m'a envoyé une photo de mon neveu. Niko, c’est le trésor de notre famille. Le fils de mon défunt frère. Il faut que je...
La cabine est prise d’une sorte de secousse, puis s'arrête. Les touches de la cabine clignotent vivement puis s’éteignent. Tout semble être rentré dans l’ordre. Que s’est-il donc passé ? Comme pour répondre à ma question, les battants coulisses et laissent entrer une personne ou plutôt un homme. Un autre message me parvient et puisque j'ai le nez plongé dans mon téléphone je ne peux que distinguer la partie inférieure de son corps. Il est vêtu d'un pantalon gris. J'aperçois rapidement ses mains.
Humm... Jeûnes et bien entretenues. Elles doivent appartenir à un beau spécimen, si je ne m'abuse. Au moins, il n’est pas armé. Je reste toutefois en alerte et je plonge ma main libre dans mon sac pour atteindre mon arme.
Il pénètre la cabine et se met de côté. Je ne relève pas la tête.
Pourquoi l'aurais je fais ? Je pensais être la seule personne encore présente dans le bâtiment. Manifestement ce n'est pas le cas. La dernière chose que je veux, c'est faire la conversation.
Après quelques secondes à me demander si son intention est de m’attaquer, je décide de l’ignorer, mais de le surveiller. Je ne cherche pas à connaitre donc l'identité de mon voisin au parfum très troublant. Lui non plus. Parfait.
Je réponds rapidement à Zara et j'attends sa réponse. Une ou deux minutes plus tard, comme si la nature était contre moi, l’ascenseur s'immobilise à nouveau, cette fois ci en une secousse plus brutale. Quelques secondes après les lumières s'éteignent.
Le noir complet. Ce n'est pas vrai ! Une panne d'électricité. Mon téléphone éclaire par sa faible luminosité mon visage. Cela me rassure, malgré mon inquiétude grandissante. Malheureusement, ma pseudo quiétude ne dure pas, car c'est le moment qu'a choisi ma batterie pour me lâcher !
Génial! Nous sommes dans le noir complet. Je me demande où est exactement mon voisin. Je lève enfin la tête, mais sans surprise je ne distingue rien.
Je lâche un juron dans ma langue maternelle.
— Madre de Dio! Ce n'est pas vrai !
Je sens que quelqu'un, c'est-à-dire mon voisin se rapproche de moi. Je serre mon arme plus fort.
— Vous avez peur ?
Cette voix... Elle ne peut provenir que d'un homme...
Alexya! Reprends-toi!
— Non, je n'ai pas peur. Et vous?
— Disons que je pense actuellement à tout autre chose. Voyez-vous, être coincé dans un ascenseur avec une femme aussi belle que séduisante, c'est l'un de mes fantasmes.
Je hoquette de surprise. Cet homme ne manque pas de toupet !
— Voyez-vous, ce serait vraiment dommage que votre fantasme se transforme en une circonstance de mort pour vous.
Je sens qu'il étouffe un rire, et je perçois son souffle près de moi.
Près de moi? Dio! Il est en face de moi!
L'effluve de son parfum me titille l'odorat, et l'envie de le sentir à la source me prend. Qu'est ce qui m'arrive?
— Que pourrait bien me faire une jeune femme aussi délicate que vous?
Tu pisserais dans ton pantalon si tu savais ce qu'elle pourrait te faire la demoiselle. L'envie de lui filer un coup de genoux dans son entre jambe me prend. Mais, la curiosité me pousse à attendre. Je veux voir, ce qu'il va essayer de faire.
— Qui vous dit que je suis délicate ?
— Votre apparence. N'ayez pas peur, nous sommes seuls.
Sa main frôle mon bras et une décharge électrique très forte, me traverse. La tension sexuelle qui se propage dans la cabine restreinte est palpable. Qu'est-ce qui se passe??
Ça ne peut être que la tension accumulée ces derniers jours. C'est quand la dernière fois que j'ai couché avec un homme ? Deux mois! C'est long! Je comprends mieux pourquoi mon corps se prête à ce jeu de séduction ridicule.
Soudain, sa main effleure sensuellement la courbe de mes reins. Ses yeux sont dotés d'infrarouges ou quoi ? Comment arrive-t-il à distinguer mon corps dans le noir ?
Son torse ferme et puissant se colle contre ma poitrine pour m'immobiliser contre la paroi de la cabine. Je me retrouve bloquée entre son corps chaud et la paroi en acier, métallisée. Je devine qu'il vient de poser sa main à côté de mon visage pour mieux contrôler la situation.
Son autre main parcourt lentement le bas de mon dos, jusqu'à la naissance de mes fesses. Il pose ses lèvres avec une lenteur diabolique sur la peau de mon cou. Le contact est enivrant, presque irréel. J'essaie de ne pas me laisser emporter totalement par la situation.
Je reste calme, tentant de garder la tête froide. C'est la première que je vis un moment pareil. C'est... Déroutant et déstabilisant. Je pourrais totalement basculer et me laisser aller au désir qui me tord le bas ventre, simplement par la sensation qu'il me procure.
Il prend brusquement mes lèvres à pleine bouche comme s'il allait me dévorer. Je retiens mon souffle et mes lèvres pour les empêcher d’accueillir sa langue qui s'insinue avidement entre elles.
Au diable les convenances ! Au diable les bienséances. Voilà trop longtemps que j'ai été privé de ces sensations. Je me presse de mettre la part de moi, froide et vindicative de côté. Ce n'était que pour quelques minutes, que pouvait-il bien m'arriver?
Toujours aussi méfiante, je ne lâche pas mon arme. Par contre, j’approfondis le baisé et je débarrasse ma seconde main de mon portable que je laisse tomber dans mon sac. De toute façon, Mirko est dans les parages et je sais me défendre. Je lâche un petit gémissement, lorsque son corps se presse lourdement contre le mien et de ma main libre je l’attire à moi.
Je ne suis qu'un corps brûlant de désir et d’impatience.
Qu'est-ce qui t'arrive ? Vas-tu vraiment faire ce que tu t’apprêtes à faire ?
À cette question, je n'ai pas de réponse. L'habileté et la volonté de son étreinte ne laisse aucun doute sur la suite des événements. Doucement, il relâche la pression sur mes poignets. Je pose alors ma main sur sa taille sculptée, puis je remonte le long de sa veste pour défaire les boutons qui la maintiennent fermée. J'entends le froissement du tissu qui glisse et tombe au sol.
Lorsque de ma main, je caresse ses pectoraux, je l'entends étouffer un petit soupir très troublant.
— Avez-vous peur de la mort ? Me murmure-t-il soudain.
— Et vous ? Fais-je en ouvrant les yeux.
— Je veux bien mourir, si la cause est noble.
— Le sexe est assez noble pour vous ?
— Non. Le plaisir, la vengeance et l’amour le sont plus.
— Je graverai donc sur votre pierre tombale, que vous êtes mort de plaisir.
— Pas si c’est moi qui vous tue en premier.
À son tour, il palpe ma peau sous le tissu de ma jupe, et monte jusqu'à mes fesses sur lesquelles son touché devient insistant et très sensuelle. Je sors précipitamment, les bords de sa chemise qu'il avait soigneusement rangée dans son pantalon, et je touche son bas ventre. Il ne le sait peut-être pas, mais mon objectif est avant tout de vérifier s’il porte une arme ou un quelconque dispositif d’écoute. Ce qui n’est visiblement pas le cas.
Humm... Il a une pilosité très développée. Tout ce que j'aime. Je descends habilement le zip de la fermeture de son pantalon, et aussi vite que je peux, je glisse ma main sous son boxer et je suis en contact direct avec son membre, dressé et dur comme un roc.
Une fierté venue de nulle part, me prends quand je me rends compte de la force de son désir pour moi. Je le caresse lentement pour faire durer le plaisir. On entend plus qu'un mélange de gémissements et de souffles haletants dans la cabine.
Il m'empoigne par les fesses et mon entre jambe est pressée contre le sien. Dio, que c'est bon. Cette sensation de plaisir mêlée à celle du danger est hallucinante.
Alexya! Réveille-toi !
Visiblement, mon cerveau est tombé en panne au même moment que l'ascenseur. Je sors entièrement son membre hyper tendu, tout en continuant de le caresser. Il veut se placer entre mes jambes, je m'agrippe à lui pour hâter le moment. Soudainement, la lumière revient en un flash aveuglant.
Pourquoi ? C'est la première question que mon corps en transe se pose.
Impossible de distinguer les traits de mon mystérieux partenaire, car à la seconde où la lumière est revenue il m'attire vivement à lui, et me maintient fermement contre lui. De sorte que je ne puisse pas voir son visage.
Je cligne plusieurs fois des yeux pour m'habituer à nouveau à la lumière. Ma paume de main encore posée sur mon torse, je peux ressentir la fermeté et la puissance de ses pectoraux. Toujours aussi troublée, je me laisse encore une fois emportée par notre proximité, par l'odeur de son parfum et par le contact de sa peau.
Alors que je tente de reprendre mes esprits, je sens sa voix chaude et rauque me caresser le lobe de l’oreille.
— Je vais descendre à cet étage, gardons ce moment secret.
Pourquoi? Je veux le voir moi ! Cependant, c’est avez une froideur calculée que je lui réponds.
— Je préfère que l’on oublie.
La tête toujours baissée, je le repousse après un sursaut de fierté. Après ma redescente sur terre, je ressens comme une sorte d’élancement dans mon poignet gauche. Ma main est ankylosée. Il faut que je la bouge. Elle est restée emprisonnée dans mon sac.
— Vous ne voulez pas savoir qui je suis ?
— C’est ce que vous voulez ?
— J’avoue que la situation me convient parfaitement ainsi.
— J’ai aimé ce moment et je ne veux pas être dans être obligée de prendre une décision pour le moins négative.
— Laquelle ?
Celle de te tuer idiot.
— Vous poursuivre pour que l’on termine ce qu’on a commencé.
Il vaut mieux lui faire croire qu’il m’a fait perdre la tête pour contenter son égo de mâle.
Ne t-a-t-il pas fait perdre la tête ?
Oui. C’était différent, pour une fois. Ah et puis, c’est tant mieux, s’il veut que le moment reste secret. Ça m'ôtera ce sentiment de frustration que je sens naître en moi. Je ne mettrai pas un visage sur cet instant de folie que je viens de passer.
— C’est le moment où vous partez très cher inconnu de l’ascenseur. Ne me dites pas que vous souhaitez continuer.
— Chaque chose en son temps belle femme sexy de l’ascenseur. Ne me dites pas que vous en avez encore envie.
Je dois reconnaître au moins une chose, cet homme mystérieux a du répondant. Je décide de prendre les choses en mains.
— Écoutez, je ne vais pas risquer d’avoir un torticolis, juste pour vous faire le plaisir de ne pas voir votre visage. Alors soit vous sortez, soit je lève la tête.
Il se retourne sans un mot, appui sur une touche et sort dès que l’ascenseur s’ouvre. Bien. Quelques minutes plus tard, je suis dans le parking, où patientent Mirko et mes hommes. L'air frais calme automatiquement ma peau incandescente. J'espère au moins que mes joues ne sont pas écarlates.
Dès que Mirko m'ouvre la portière, je lance un dernier regard vers la cage de l’ascenseur et je me rends compte d'une chose : Il s'en est fallu de peu pour que je m'envoie en l'air avec un inconnu. Un inconnu dont je n’ai même pas vu le visage.
Je prends siège dans le cuire moelleux de ma limousine, sans aucun regret. J'aime le goût du risque, des situations incongrues, des sensations fortes. Et ce soir, j'en ai eu pour mon compte. Sauf que... Le plaisir aurait été immense si nous avions été au bout de ce que nous avons commencé.
Il faut vraiment que je me trouve un partenaire sexuel, prochainement. J'ai un trop plein de pression qu'il faut obligatoirement évacuer.