Chapitre 3

3694 Words
J’avais les muscles des bras engourdis, l’odeur du gaz m’avait donné une jolie migraine. J’avais passé le temps que j’avais à compter les minutes qui s’écoulaient. La destination où nous étions en ce moment se trouvait à deux heures si ce n’était pas plus de la base militaire. Je fus interrompu dans mon décompte quand le VUS se mit à ralentir.  Les roues du véhicule frottèrent contre la garnotte quand il s’arrêta, me mettant la puce à l’oreille que nous étions enfin arrivés à destination. Je raidis mes muscles quand les trois individus descendirent de la voiture simultanément. J’étais en désavantage, j’en avais conscience. Je n’avais aucune idée d'où j’étais, même si je me doutais un peu soit-il de notre emplacement. J’avais déjà entendu des soldats parlés du territoire humain, ils en faisaient référence comme la ruche principale. Je ne serais donc pas surprise que nous soyons là.  -Va rejoindre les autres chimères, entendais-je. Ils sont à quelques mètres derrière nous.  Aucune réponse.  Je tournai la tête sur le côté, observant les trois paires de bottes partir dans différentes directions. Mes yeux ne lâchèrent pas un seul instant ceux de la chimère alors qu’il se dirigeait à la direction opposée des deux soldats.  Je décidais d’entendre encore quelques minutes dans ma position. Je n’avais aucune idée de comment la rencontre allait fonctionner, je ne connaissais pas les marches à suivre. Alors il fallait y aller logiquement. Le rôle principal des chimères n’était pas de protéger Buck, au contraire. Ils étaient présents seulement dans une tentative d’intimidation auprès des chefs des clans respectifs. Je ne serais pas surprise que l’enfoiré veuille seulement leur démontrer qu’il avait enfin réussi à créer quelque chose d’assez puissant pour leur faire peur. Il les menaçait, autrement dit. Tout de même, je me permettais de douter que cela fonctionne.  Les soldats ? C’était eux les vrais gardes du corps. Les chefs des clans avaient fait face à des armes et des menaces depuis qu’ils avaient dévoilé leur existence. Les hommes ne leur faisaient plus peur. Les armes n’avaient plus le même effet. Bref, ils ne les craignaient plus.  Les chimères devaient être en troisième ligne, donc les derniers à faire leurs apparitions dans la salle. Peut-être qu’il voulait créer un impact assez gros pour détourner leurs attentions ? Mais la question était de quoi ?  Je fus tiré de mes pensées quand j’entendis des pas fracassants sur le sol. Des cœurs battaient à l’unisson, se rapprochant de ma position. Beaucoup de cœurs même.  J’attendis encore, laissant passer les dizaines de chimères qui se suivaient en rang chacune derrière les autres. Quand la dernière fut passée, je me laissai tomber sur le sol, prenant garde de ne pas faire de bruit. Je roulais à nouveau afin de faire irruption de sous le camion, me mettant rapidement sur mes pieds. Je réajustais ma capuche, me faufilant dans la file. Mon odeur était une porte d’entrée suffisante pour ne pas emmener les soupçons sur ma présence dans les rangs.  La température était chaude, agréable. Le soleil brillait dans le ciel, reflétant ses rayons sur nos manteaux foncés. La grande bâtisse où se déroulait la rencontre ressemblait drôlement à une église. La bâtisse en brique était vieille, mal entretenue. Je remarquais plusieurs voitures quand nous traversions l’allée pour nous rendre à l’entrée principale. Je serrai les dents en reconnaissant la Mercedes rouge d'Alan Buck. L’envie de sortir les griffes et d’y ajouter une nouvelle décoration à sa belle bagnole me tentait férocement. Je m’y résidais. La sensation allait être atrocement satisfaisante quand c’est sa gorge qui sera entre mes mains, et non une carcasse de métal.  Soudainement, la chimère en avant de moi s’arrêta. Je suivais le mouvement, faisant bien attention à ne pas lui foncer dedans. Je dus pencher la tête sur le côté afin de voir ce qui se passait en avant du groupe. Ma vision et mon ouïe surdéveloppée me permirent de bien voir et d'entendre le soldat parler à l'avant.  -Les ordres sont simples, dit-il en nous observant, le menton levé. Vous restez en troisième ligne, en arrière du groupe. Une équipe va être tout près de vous, un tireur d’élite va vous gardez à l’œil compris ? Vous parlez, bougez, ou bien tentez quoi que ce soit durant la réunion, vous allez payer les conséquences de vos actes en ayant une balle dans le crâne. C'est clair ?  Le silence lui répondit.  Satisfait, il franchit la porte, bientôt suivie de deux autres hommes en uniforme. Le rang se remit en marche, faisant leur entrée chacun leurs tours. Mon cœur se mit à battre plus rapidement contre ma cage thoracique quand ce fut à mon tour de passer la porte.  L’air se fit aussitôt beaucoup plus lourd à l’intérieur. Le niveau de puissance qui somnolait dans la pièce me donna la chair de poule, un frisson me parcourut la colonne vertébrale. Je remarquai que je ne fus pas la seule à le ressentir, puisque certaines des chimères tentaient même de se faire plus petites. Je tentais de localiser celle qui était avec les deux soldats du début, mais en vain.  Un homme en uniforme pointa le canon de son arme devant lui, nous montrant la ligne déjà entamée derrière les troupes regroupées près d’un seul homme. Tous mes muscles se raidirent quand son odeur me parvint. Alan Buck. Accompagné de deux soldats, il se tenait droit comme un piquet, faisant face à une large table. Quand j’arrivai à ma position, je fus capable de mettre un doigt sur la cause de toute cette puissance qui nous étouffait.  Sept personnes étaient assises les unes près des autres, dévisageant Buck. Pour une raison quelconque, mon corps réagit abruptement à leurs présences. Ma bouche s’assécha, la transpiration se mit à couler le long de mes tempes. J’eus un léger geste de recul, n’aimant pas la sensation que cela me procurait. C’était quoi ce bordel ?  -Vous êtes en retard, dit un homme à la peau pâle.  Mon estomac se tordit quand je posai les yeux sur lui. Ces cheveux noirs mi-longs lui tombaient sur le front, approfondissant la couleur presque translucide de sa peau. Ces yeux verts étaient de la couleur de Jade, étincelant d’un teint beaucoup plus pâle. Ces épaules étaient larges, mais je devinai facilement qu’il était grand et mince. Je ne le lâchai toujours pas du regard quand il étira ses longs bras devant lui, les posant sur la table. Bref, c’était un bien joli vampire qu’on avait ici.  -Bonjour à vous, dit Buck en l’ignorant.  Ce fut au tour de vampire de l’ignorer, laissant ses longs cils se reposer sur ses pommettes. Je plissai les yeux. Son visage était froid, sans émotion particulière. Il se dégageait de lui quelque chose que je pouvais facilement identifier, quelque chose d’animal. Sans que je puisse savoir pourquoi, son attitude m’excitait.  Je serrai les poings contre moi.  -Allons directement au sujet, dit Alan en souriant. Il faut que je tue combien des vôtres pour que vous compreniez qui est le chef ?  Sa voix se fit plus menaçante et j’étais prête à parier qu’il devait les fusiller du regard. Je riais intérieurement. Cet imbécile essayait de faire peur, mais vu la réaction de son corps, il démontrait sans aucun doute qu’il était stressé, peu sûr de lui. Quelques soldats en deuxième ligne dansèrent sur leurs pieds, mal à l’aise. Un silence de plomb s’abattit.  Buck ne s’arrêta pas là, posant ses mains sur la table pour leur faire face.  -Je croyais avoir été clair, dit-il en les regardant un à un.  À nouveau, personne ne répondit, ne se contenta de l’observer.  -Vous savez combien des vôtres mes équipes on dut exécuter ? Est-ce que je dois vous faire le décompte ?  -Nous connaissons les nombres, humains, cracha un homme au bout de la table.  Je n’avais jamais vu un ange si ce n’était que des chimères, je savais tout de même qu’ils étaient très attirants, frêle, mais ils étaient de vrais guerriers. Des cheveux blonds, de grands yeux bleus semblables à la couleur d’un ciel éclairci. Il abordait un visage juvénile, mais l’étincelle dans ses yeux montrait qu’il ne fallait pas se fier à son apparence. Comme certaines chimères, il avait des marques sur son visage, allant de son œil jusqu’à son menton. J’avais l’impression d’observer un mandala muni d’un halo lumineux. Je savais exactement ce que c’était, puisque moi-même j’en étais pourvue d’un, mais contrairement à l’ange, c’était mon bras droit qui en était couvert. Je vais être honnête, le sien était beaucoup plus délicat, plaisant à regarder.  -Garder votre arrogance pour quelqu’un d’autre Maël, dit-il avec dégoût. Cet humain, dont tu parles, peut te faire disparaître toi et tes sbires d’un simple claquement de doigts !  Je haussai un sourcil. Il poussait un peu trop le bouchon pour quelqu’un qui avait emmené deux unités complètes pour le protéger.  L’ange serra la mâchoire. La colère qui se dégageait de lui vint me frapper directement dans l’estomac. Je serrai les poings. Une partie de moi voulait me ranger à ses côtés, lui prouver que j’étais digne de faire partie de sa race. La marque à mon bras droit se mit à chauffer, me faisant grincer des dents. Super !  -Faites attention, grogna quelqu’un.  Chaque muscle de mon corps se crispa tout en même temps. Ma poitrine se serra sous l’assaut. J’entrouvris les lèvres, faisant rentrer l’air dans mes poumons dans de courtes respirations. Je pouvais sentir mon sang se réchauffer, la sueur perler partout sur mon corps. Je gardais un visage neutre, calmant les battements affolés de mon cœur. Qu’est-ce qui se passait ?  Je vis Buck tressaillir légèrement. Il était apeuré face à cet homme, cela se sentait à des kilomètres à la ronde.  -Ah Wilo, mon cher Wilo, dit Buck en se reculant. Tes ordres de chiens, tu peux les garder pour toi.  La première chose qui me frappa chez le loup fut ses yeux. Malgré la distance qui nous séparait, je pouvais facilement voir ses yeux bleus qui semblaient avoir été sculptés dans la glace fusillée Alan du regard. La deuxième fut sa taille. Une chimère moitié-loup ne faisait pas le poids contre lui, et ils étaient costauds, faits en muscle. Mais cet homme, c’était autre chose, un autre niveau de puissance. Je ne pus détacher mon regard de ses bras couverts de tatouages, en particulier l’aigle en position d’attaque qui monta jusqu’à dans le côté de son cou. Ces cheveux châtain pâle étaient en bataille sur sa tête, je me demandais si la texture était aussi délicate entre mes doigts.  Les soldats furent aussitôt en alerte, serrant leurs armes plus près d’eux. Soudainement, le dernier des hommes qui prenaient place autour de la table se leva à son tour, posant ses fesses sur le bord de la table. Ses cheveux sombres étaient tirés vers l’arrière, il abordait une barbe de quelques jours. Il n’était pas aussi costaud que le loup ou bien grand que le vampire, mais il dégageait quelque chose de très menaçant. Je pouvais le sentir dans mes tripes. Bien entendu, les démons n’étaient pas l’espèce la plus saine d’esprit, mais personne ne pouvait nier qu’ils étaient autant fascinants, même plus que les autres créatures. Ils n’étaient pas pourvus d’une grande beauté, mais leurs yeux étaient suffisants pour mettre quiconque à leur merci. Son iris foncé faisait ressortir ses pupilles émeraude, du noir recouvrait le bas de sa paupière, accentuant encore plus son regard. Contrairement aux deux autres hommes, ce ne fut pas l’envie qui me prit aux tripes en l’observant, mais quelque chose de plus doux, plus fraternel.  Je ne pus m’empêcher de frôler mon œil droit du bout du doigt.  -Toujours en train de flatter Wilo du mauvais sens du poil à ce que je vois, dit-il en soupirant. Nous sommes ici, parce que je l’ai demandé. Plusieurs problèmes me dérangent, vois-tu Alan ? À ce que je comprends, les vagabonds tiennent ton équipe pas mal occupée, pas vraie ?  Des vagabonds ? J’avais déjà entendu quelques fois ce nom, mais je n’avais jamais été au courant de leur situation ou bien ce qu’ils étaient.  -Effectivement, dit Buck en se calmant légèrement.  -Tes chimères, dit le démon en pointant notre rangée du menton. Ils ont été créés pour nous protéger, nous tous, pas vrai ?  L’air s’alourdit grandement d’un coup. Alan jeta un bref coup d’œil à Marcus près de lui.  -C’était ce qui était convenu, dit Buck en fronçant les sourcils. Le sang des vôtres, contre la paix et notre protection.  Le démon se leva, ajustant les manches de son chandail noir.  -Effectivement, dit-il en lui faisant face. Alors, dis-moi Alan, fils d’un grand clan de chasseurs ! Pourquoi est-ce que nos familles ont disparu depuis des semaines ? (Sa voix s’alourdit) La meute Hunter manque à l’appel, avec mon petit frère inclus. (Il se pencha vers Alan) Tu ne sais rien à propos de cet incident ?  Un nouveau silence s’abattit. Les chefs des clans fusillaient tous Alan du regard, attendant, eux aussi, une réponse. Je mettrai ma main au feu qu’ils savaient tout ce qu’ils voulaient savoir, mais l’entendre de sa bouche était la principale raison de leur venue sur un territoire humain sans aucun renfort derrière eux. On dirait que je n’étais pas la seule à le vouloir mort.  -Je ne sais pas de quoi tu veux parler, lui répondit Buck en soutenant son regard.  Le démon eut un sourire en coin, la colère brillait dans ses prunelles. Il se recula.  -Alors ce n’est qu’une coïncidence ? La meute Hunter est la plus puissante que le monde n’est jamais connu, dit-il en mettant ces mains dans ses poches. Ta famille a essayé de tuer la première et la deuxième génération, dis-moi, je ne me rappelle plus, pourquoi ton père à décider de mettre une trêve à ce combat ? (Alan ouvrit la bouche) Ah ! Laisse, je m’en souviens ! Mon petit doigt me dit que la meute était devenue beaucoup trop puissante pour vous, pas vrai ? Après tout, la deuxième génération a décidé de rester avec leurs parents, emmenant avec eux leur compagne et compagnon respectif dans la meute. Si je me souviens bien, chacun des petits ne s’est pas imprégné de loup, mais bien d'autres espèces différentes n’est-ce pas ?  Nouveau silence. Sincèrement, j’étais complètement perdue. J’avais entendu parler de la meute Hunter, mais brièvement. Tout ce que je savais, c’était que cette meute était crainte par toutes les espèces surnaturelles, dont les humains. Je n’avais aucune idée que cette meute avait une personne de chaque espèce dans leur rang ! Je comprenais mieux pourquoi ils étaient aussi craints. Tout de même, ils avaient disparu ? Pourquoi cela sonnait beaucoup plus grave que le démon tentait de le démontrer ?  -Mon petit frère fait partie de cette meute Alan, et tu dois savoir que Wilo est le fils de Thunder et Mackenzie n’est-ce pas ?  -Je suis le seul de ma famille à avoir quitté la meute, dit le loup en crispant les poings. Je ne voulais pas ébruiter la nouvelle puisque je suis le seul enfant de la troisième génération et le seul à quitter le nid familial. Les vagabonds se feraient un plaisir de s’en prendre à moi pour attirer ma famille dans leurs filets. (Wilo se rapprocha à son tour) Tu semblais surpris de me voir Alan, dit-il en plissant les yeux. Pourquoi ?  Merde, plus j’y pensais, plus que je croyais que le loup avait raison. Je ne comprenais pas une seule chose concernant leur situation actuelle, mais Wilo avait raison. Alan avait été surpris de le voir autour de la table. Son expression, même si elle avait été brève, ne pouvait pas mentir. Si je m’en étais rendu compte, ça l’avait dû être un jeu d’enfant pour eux de l’avoir remarqué.  Buck ne dit rien, reculant d’un pas pour rejoindre les soldats. Au même moment, le démon décida de venir dans notre direction. Les bras croisés, il se positionna nonchalamment au bout de ma rangée, à mon opposé.  -Ils sont loyaux, pas vrais ?  Melson qui nous surveillait hocha discrètement la tête, ne voulant pas observer le démon dans les yeux.  -À notre précédente rencontre, dit-il en continuant sa marche. Tu nous as parlé d’une arme, tu semblais si fière ! Tu l’as emmené avec toi ?  -Un échec, dit Alan en jetant un bref coup d’œil derrière lui. L’enfant est un échec total.  Je serrai les dents. Tout un compliment venant d’un homme qui semblait prêt à pisser dans ses pantalons !  -Un échec tu dis ? La dernière fois qu’on en a parlé, il devait avoir quoi ? 12 ans ?  -Elle, reprit Melson. C’était une fille.  Le démon s’arrêta brièvement, se tenant maintenant à seulement quelque mètre de ma position.  -Une fille ? Elle doit être âgée de quel âge maintenant ? 20 ans ? 21 ans ?  Effectivement, j'ai 21 ans.  Le démon reprit sa marche, jetant de brefs coups d’œil aux chimères devant lui.  -Était, reprend Melson. Elle est morte.  Toutes les têtes se tournèrent vers lui, sauf celle du démon. Au contraire, un sourire lui tordit la bouche.  -Dommage, dit-il en s’arrêtant enfin devant moi. Je suis sûr qu’elle était magnifique, après tout, une chimère qui partage chacun notre sang se doit d’être un spécimen assez surprenant n’est-ce pas ? (Il me fit dos, posant son regard sur Alan) Elle est morte comment ?  Buck ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais fut soudainement interrompu.  -Mes hommes l’ont tué, dit Marcus tout près de son chef. Cette chose n’était ni impressionnante ni magnifique. Elle ressemblait et était un monstre, point final.  Malgré moi, je grinçais des dents. Après tout ce que ces enfoirés m’avaient fait subir, mentalement et physiquement, ils avaient encore les couilles de cracher sur moi ? En plus, il prenait le trophée de ma mort ? L’image des deux chimères me revint à l’esprit. Mon corps fut pris d’un tremblement, enragé.  -Je doute, s’exclama soudainement le démon.  Je levai les yeux. Je me figeai complètement en voyant ses yeux fixés sur mon visage, la tête légèrement penchée sur le côté. Je le dévisageais à mon tour, lui faisant part de la rage qui me consumait.  -Elle est magnifique.  J’eus un bref geste de recul. Il se retourna alors soudainement, gardant sa position en face de moi.  -Alors Alan, reprit-il. Tu n’as jamais répondu à la question de Wilo. Pourquoi étais-tu ? Du coin de l’œil, je vis une lumière. Je tournai la tête, observant la fenêtre dans le fond de la pièce, juste derrière les chefs des clans. Sans réfléchir, je posai ma main sur le poignet du démon, le dégageant de mon champ de vision. C’est là que je le vis, à des kilomètres de distance de notre position. La chimère, celle qui était dans la voiture et qui n’était pas présente dans la salle. Elle se tenait sur l’immeuble en face, un fusil de précision dans les mains. Je croisai son regard. Alors c’était lui le tireur d’élite ?  C'est à ce moment que toutes les pièces du casse-tête se mirent en place dans ma tête. Alan Buck ne voulait plus rien avoir avec les créatures surnaturelles. Après toutes ces années, il a eu ce qu’il voulait, une arme parfaite. Maintenant, il était temps de commencer le ménage. Incluant les chefs des clans.  Je jurais contre moi-même. Fais chier !  Je posai ma main dans le cou du démon, le penchant rapidement vers le sol. Au même moment, un sifflement me parvint en haut de nos têtes, pour terminer dans un bruit sourd semblable à un ricochet.  Plus aucun mouvement ne se fit. Je tournai lentement la tête pour regarder derrière moi, observant le trou dans le mur. Je fermai les yeux, poussant un profond soupir. Dix chimères à moins de deux mètres de moi et une quinzaine de soldats armés jusqu’aux dents prêts à tirer sur tout ce qui bougeait en plus de grincheux qui semblait déterminer à mettre une balle dans la tête de tout le monde.  Je pourrais utiliser la situation à mon avantage et profiter de la présence des créatures comme couvertures et m’enfuir, comme ça, j’avais encore des chances de mettre un terme à mon plan, c’est-à-dire détruire Alan Buck et son organisation. Ces hommes et femmes n’étaient que des dommages collatéraux, rien de plus… J’ouvris les yeux à nouveau.  -Ça ne le fera pas, murmurai-je pour moi-même.  Je me mis à droite comme un piquet retira mon manteau d’une main pour le jeter au sol, dévoilant mon visage. Habillé d’un simple chandail foncé et d’un pantalon de la même couleur, il était facile d’apercevoir les marques sur mon bras se mettre à illuminer. Mes ongles s’allongèrent en griffes, mes longs cheveux argentés derrière mes oreilles légèrement pointues tombèrent sous ma poitrine. Je pouvais facilement deviner que mon œil droit, identique au démon à mes côtés, était maintenant accompagné d’une pupille jaunâtre étincelante.  -Une balle parcourt en moyenne l’air en moins de dix secondes… Le coup de feu retentit. En moins de cinq, j’attrapai mon katana dans mon dos, recula mon pied et abattit la lame au même moment où le projectile s'apprêtait à faire un joli troue dans ma tête. Coupée en deux, la balle tomba au sol.  Je sentis les chimères être plus nerveuses, leurs cœurs se mirent à battre plus rapidement d’excitation. La vérité était si simple, je n’avais aucune chance contre tous ces gens. J’hésitai un bref instant.  -Seule, dis-je pour que tout le monde m’entende. Je n’ai aucune chance contre vous si je suis seule. Mais avec lui… (Je fis un sourire en coin)  Le temps se remit en place, les émotions qui passèrent sur le visage de Alan me donnèrent une satisfaction pure. Les veines dans ses yeux éclatèrent de colère, il pointa aussitôt son doigt dans ma direction.  -Tuez-là !  Ignorant les canons des armes qui montèrent vers mon visage, je fermai les paupières. Mon sang se fit plus chaud, sa présence que j’avais longtemps refoulée fit son apparition à nouveau comme un train sortant d’une gare.  -Nacht, murmurai-je.    
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