Allongée sur un transat, Meghna profitait du soleil.
Son teint avait pris quelques couleurs ce qui n’était pas plus mal. Ses mois enfermés sur cette plateforme avaient accentué la pâleur naturelle de son teint hérité de son père. Car sa mère, elle, était noire et parfois elle regrettait de ne pas avoir la peau un peu plus matte pour lui ressembler un tout petit peu.
Souriant, elle tourna la tête et aperçut sur la terrasse Elio au téléphone parlant en anglais. Une langue qu’il pratiquait aussi bien qu’elle et dont elle s’était rendu compte ses derniers temps, même si elle le savait déjà.
Il portait un short kaki et un t-shirt et son regard fut attiré malgré elle par ses cuisses musclées et ses jambes velues. Le souvenir de sa poitrine sculptée aperçut la vieille alors qu’il nageait la fit frissonner. Elle détourna vivement les yeux.
Cela faisait quatre jours qu’ils supportaient cette cohabitation forcée et avec beaucoup d’astuces, ils se croisaient très rarement même au moment des repas. Ils s’évitaient ce qui n’était pas pour lui déplaire.
Elle avait de plus en plus de mal à faire abstraction du désir qu’il lui inspirait.
C’était la première fois que cela lui arrivait et elle avait du mal à se contrôler. Et bien sûr, il avait fallu que cela tombe sur lui ! Elle qui avait toujours su garder les hommes loin d’elle, la voilà en train de fuir volontairement un homme de peur de succomber à elle ne savait quoi. Ce qui était stupide car pas une seule fois depuis qu’ils s’étaient retrouvés ici, il n’avait fait un pas vers elle pour lui signifier qu’elle l’attirait.
Elle devrait plutôt être contente de se rendre compte qu’elle n’était pas insensible aux hommes. Elle n’était ni glaciale ni frigide. Elle était juste elle.
Jetant un regard à l’heure sur son portable, elle soupira.
Elle ferait mieux d’aller commencer à se préparer pour sa soirée. Victor avait promis lui envoyer une voiture pour venir la chercher ce soir et si elle voulait être prête, elle allait devoir s’y mettre. Elle avait passé la journée d’hier au salon de beauté pour une pédicure et une manucure de rêve qui faisait briller ses ongles d’un noir brillant sauf les annuaires qu’elle avait recouvert d’un rouge écarlate. L’esthéticienne avait été surprise par son choix mais elle avait toujours été originale dans son genre.
Se levant, elle revêtit son sarong et passa près d’Elio.
C’était à peine s’il fit attention à elle. Elle ne put s’empêcher de jeter un regard vers ses larges épaules. Avec son teint mat, difficile à croire qu’il vivait la plupart du temps à Londres et non en Italie.
Grommelant, elle monta dans sa chambre se préparer.
* * *
Elio mit fin à sa communication et leva la tête vers les escaliers menant à l’étage.
Meghna était montée il y a plus de deux heures et n’était toujours pas redescendue.
Comme d’habitude, elle l’évitait. Et, lui aussi.
Il appréciait de moins en moins sa manière dont son corps réagissait en la présence de la jeune femme mais ce soir il allait devoir le supporter. Il avait décidé de l’inviter à diner ensemble sous la pergola afin d’essayer de mieux s’entendre. S’éviter n’était pas la chose à faire car ils étaient de la même famille après tout.
Ils pourraient apprendre à se connaître. Et pourquoi ne pas s’apprécier ?
Il allait tout de suite, lui en parler.
Deux minutes plus tard, il était devant sa chambre et frappa. Une seconde plus tard, elle lui cria d’entrer. Il poussa la porte et se retrouva à nouveau dans sa chambre aux reflets bleus et or. Il était à peine entrer qu’il la vit sortir de la salle de bain resplendissante en train d’enfiler des boucles d’oreilles.
Elio figé, la contempla. Elle portait une courte robe blanche-dorée dont l’ourlet s’arrêtait à mi-cuisse dévoilant ses longues jambes sculpturales légèrement halée juchées sur des sandales noires à haut talons. Le haut de sa poitrine et les longues manches étaient en dentelle transparente laissant apercevoir sa peau qui avait pris quelques couleurs mais qui ne cachait rien de son teint de porcelaine. Ses cheveux courts étaient légèrement gonflés donnant à son visage un air enfantin et en même temps plus féminin que son maquillage léger rehaussait encore.
Son regard fut attiré par ses lèvres nappées d’un rouge écarlate qui rendait sa bouche très fascinante. Appétissante. Elio sentit une flèche de désir lui transpercer les reins et déglutir.
- Oh ! Je pensais que c’était Rosario, dit-elle en le toisant surpris. Tu voulais me parler, Elio ?
- Je pensais qu’on aurait pu diner ensemble ce soir. Cela fait des jours qu’on vit sous le même toit et on s’évite alors qu’on est de la même famille. Je me suis dit qu’on pourrait briser la glace autour d’un diner.
- Oh ! C’est une idée géniale mais je ne peux pas ce soir. Un ami m’a invité à une soirée et la voiture qui doit venir me chercher ne va plus tarder, dit-elle en accrochant la deuxième boucle sertit d’une petite pierre rouge à son oreille.
Elio reconnut les boucles en formes de gouttes d’eau qui était assortie avec un pendentif. C’était de la première collection officielle de son amie Annika. Depuis son mariage, elle nageait dans le bonheur, à sa grande joie. Elle le méritait.
- Ce sera pour un autre soir, Elio.
- Oui. Bien sûr, dit-il d’un air absent. Je te trouve très belle, Meghna. Eh bien ! Je te souhaite une excellente soirée.
À ce moment-là, Rosario frappa puis entra leur annoncer que la voiture venue chercher Meghna était là. Avec un rire, elle alla récupérer sa pochette puis demanda à la vieille dame comment elle la trouvait. Il aurait voulu répondre qu’elle était sublime mais il ne dit rien de plus et sortir.
Une minute plus tard, il la vit monter à l’arrière d’une limousine noire qui quitta la cour un instant plus tard.
Elle s’était faite belle et avait l’air très heureux de sortir. Il se demanda qui était cet ami avec qui elle allait se rendre à cette soirée. Un ami ou plus. Un amant ? Il ressentit un brin de jalousie de l’imaginer dans les bras d’un autre homme et grommela de la tournure de ses pensées.
Meghna était adulte et libre et pouvait sortir avec qui elle voulait sans que cela ne l’affecte. Et de plus, elle était beaucoup trop jeune pour lui en plus du lien familial entre eux. Il n’aurait d’ailleurs jamais rien su de cette soirée si elle ne s’était malencontreusement pas retrouvée en ce moment comme lui à la maison.
Il dina donc seul une nouvelle fois, se promena un long moment aux abords de la propriété puis alla se coucher dans sa chambre. Mais, malgré sa fatigue, il n’arrivait pas à trouver le sommeil.
Les images du passé revenaient le hanter.
Le jour où il avait rencontré Isabella lors d’une soirée à Rome. C’était un ami qui leur avait fait faire connaissance. Il s’était sentit tout de suite attiré par elle. Avec ses longs cheveux blonds et ses yeux verts, elle était très belle. Tous les hommes de la soirée avaient tenté de la séduire mais c’était lui qu’elle avait choisi alors qu’il avait une réputation de playboy notoire pas tout à fait fausse.
À cette époque, il avait eu envie de se marier et de fonder une famille. Sans doute pour remplacer la sienne. Il avait toujours su que la perte de sa famille si tôt avait créé un vide mais avait tant bien que mal tenté d’y faire face jusqu’à leur rencontre. Ils s’étaient donc mariés assez vite. Mais, leur bonheur a été de courte durée.
Il revoyait à nouveau chaque instant de l’accident. Lorsque leur voiture avait été percutée par cette autre voiture. Un homme qui conduisait en état d’ébriété. Isabella était morte avant que les secours n’arrivent. Lui s'enétait sorti avec de multiples fractures et blessures mais depuis il avait perdu un certain goût de vivre.
Trois ans. Près de trois courtes années. C’est tout ce que la vie leur avait accordé. Il avait aimé Isabella mais pas autant qu’elle le méritait, il le savait.
Se relevant, il descendit au salon et se servit un verre de whisky puis se dirigeant vers la terrasse, avec la bouteille. Il se mit à boire tranquillement en regardant la nuit au-delà du jardin.